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22 LES FILMS DU JOUR
Semaine de la critique Quinzaine des réalisateurs
NOS BATAILLES CLIMAX
QUAND LA MUSIQUE EST BONNE
© LES FILMS PELLÉAS-IOTA PRODUCTION-SAVAGE FILM, HAUT ET COURT DIST. à lui même.” Lors de sa présentation de la sélection de
“Je ne vous en dirai pas plus car je crois que le film se suffit
cette 50 Quinzaine des réalisateurs, quelques mots auront
e
suffit à Edouard Waintrop pour faire monter la pression.
D’autant qu’aucune information n’a filtré depuis sur le film,
Gaspar Noé restant enfermé jusqu’à la dernière minute pour
le terminer. Seul un visuel en forme de logo a fait son appa-
rition le 2 mai. Climax marque le retour du cinéaste à un
tournage en langue française. Cet habitué de Cannes y
a toujours présenté ses longs métrages, cette sélection à
la Quinzaine étant une première. Centré sur une troupe
d’une vingtaine de jeunes danseurs de danses urbaines
réunis pour un stage dans un pensionnat désaffecté au
cœur d’une forêt, le
DE LA PATERNITÉ film a été produit par
“Quand je préparais mon premier long, Keeper, je me suis séparé de la mère de mes enfants. J’ai appris, Édouard Weil et Alice
comme Olivier dans le film, à vivre seul avec eux, à les regarder, à les entendre et à les comprendre. Ce fut une Girard ( Rectangle
période fondatrice pour moi, en tant qu’homme et cinéaste. Il fallait que j’écrive dessus, raconte Guillaume Productions), en
Senez. J’ai visiblement encore des choses à dire sur de la paternité. Après l’avoir traité sous l’angle adolescent coproduction avec
dans Keeper, je voulais l’incarner dans un personnage de mon âge qui, comme moi, cherche un équilibre Arte France Cinéma,
entre engagement professionnel et familial.” Nos batailles est produit par Isabelle Truc (Iota Productions), Les Cinémas de
qui accompagne le réalisateur depuis ses premiers films. Pour le rôle principal, Guillaume Senez pense la Zone et les
à Romain Duris, “un acteur créatif et généreux qui m’a toujours intrigué par sa capacité à se renouveler”. Belges d’ Artémis
Ce dernier a été convaincu par l’histoire et la méthodologie du cinéaste. “Une caméra à l’épaule qui suit Production. Quant à
l’action sans la précéder et laisse une liberté aux comédiens. Les dialogues ne leur sont pas donnés. Nous la distribution France
travaillons séquence par séquence. En improvisation, puis, petit à petit, en les accompagnant au plus près, © MANO POUR “LE FILM FRANÇAIS” et les ventes interna-
nous arrivons ensemble aux dialogues sans qu’ils les reçoivent. Je sais où il faut arriver mais pas comment. tionales, elles sont
Ce qui m’intéresse, c’est d’y arriver ensemble. Trouver une spontanéité, une honnêteté ensemble. Tout le assurées par Wild
monde participe, les comédiens et les techniciens. C’est un travail d’équipe.” P. C. Bunch. P. C.
Quinzaine des réalisateurs Quinzaine des réalisateurs
MON CHER ENFANT LEAVE NO TRACE
INTO THE WILD
Leave No Trace marque le retour à la fiction de Debra Granik, depuis Winter’s
© NOMADIS IMAGES-LES FILMS DU FLEUVE-TANIT FILMS, BAC FILMS être détectés par les services sociaux. “Le roman racontait une histoire de
Bone qu’elle avait réalisé en 2010. Adapté d’un roman de Peter Rock, le film
est centré sur un père et sa fille tentant de vivre en marge de la société sans
survie inhabituelle dont chaque détail était fascinant”, raconte la cinéaste.
“C’était l’occasion aussi de dépeindre une région précise, celle de la côte
Pacifique du Nord”. Debra Granik a écrit l’adaptation avec Anne Rosellini,
également coproductrice du film. Elle a rapidement pensé à Ben Foster
pour incarner le père. “Je le connais depuis plusieurs années et j’ai toujours
été intéressée par son travail. Il s’est souvent attaché à des personnages
d’hommes assez ordinaires, entraînés dans des conflits.” Le budget a été
réuni par le biais d’une coproduction. “C’était un nouveau cadre de travail
pour moi. J’ai toujours eu l’habitude de travailler de façon légère, mais cétait
plus compliqué dans ce cas de figure. Heureusement, nos partenaires Anne
LE FILS PRÉFÉRÉ Harrison et Linda Reisman ont fait leur possible pour soutenir ma manière de
Après Hedi, présenté à la Berlinale en 2016, le cinéaste tunisien Mohamed Ben Attia propose tourner, qui peut nettement trancher avec la façon dont la plupart des films
un film centré sur le personnage de Riadh, un père ne pouvant se résoudre à la disparition américains sont réalisés.” Leave No Trace a été tourné durant le printemps
de son fils vraisemblablement parti en Syrie. “Au départ, j’ai eu envie de parler de ces jeunes 2017 à Portland et ses environs, dans l’Oregon. P. C.
qui choisissent la radicalité comme dernier recours mais je me suis très vite rendu compte
que mon vrai sujet était la vie de Riadh, son travail, son couple et bien entendu sa paternité.”
Ayant entamé l’écriture durant la postproduction de Hedi, le cinéaste savait qu’il ne “voulait
pas faire un exposé sur ces départs ni essayer d’en diagnostiquer les raisons, mais plutôt coller
à ce père et soulever ces questions au travers de son point de vue”. Mohamed Ben Attia et sa
productrice, Dora Bouchoucha (Nomadis Images), vont de nouveau travailler en coproduction
avec Les Films du Fleuve des frères Dardenne, ainsi que Tanit Films en France, réunissant un
budget légèrement supérieur à 1 M€. Le tournage s’est déroulé en décors naturels, notamment
dans une résidence située en pleine forêt où règne “une tranquillité un peu suspecte, voire
étouffante”. Quelques scènes ont également été tournées à Istanbul. Mohamed Ben Attia a
opté pour un style précis. “Encore plus que sur Hedi, je voulais une mise en scène réaliste
qui s’effacerait presque face aux situations dramatiques. Le film est dense et grave de par
le sujet traité. Nous voulions une caméra pudique et au service de l’histoire. En travaillant le
découpage avec mon chef opérateur, le principe des plans séquences s’est imposé automa-
tiquement. Sans pour autant forcer dans l’exercice de style, ce parti pris rendait justice aux © SCOTT GREEN
comédiens et à l’histoire sans appuyer quoi que ce soit”. P. C.
13 mai 2018