Annecy 2015 - Biographie de "Ma vie de Courgette" (WIP)
En phase de postproduction, le premier long métrage de Claude Barras a été fabriqué en stop motion. Comme au Cartoon Movie, les premières images ont enthousiasmé le public d’Annecy lors d’une session Work in Progress (WIP). Le réalisateur et plusieurs des artisans de ce projet hors norme mêlant les contraintes de l’animation et de la prise de vues réelles ont dévoilé la genèse du film et sa fabrication.
Ma vie de Courgette est né en Suisse, à Lausanne précisément dans les locaux du collectif Helium Film, dans la tête de Claude Barras qui travaillait sur des courts métrages. Avec l'un de ses associés, il a lu Autobiographie d’une courgette de Gilles Paris. "Lui est parti faire du documentaire, moi j’ai gardé le projet et acquis les droits en 2006, a expliqué Claude Barras. Nous avons réalisé un pilote où nous avons pu tester pas mal d’éléments au plan esthétique et technique". Car d’emblée, le projet a été conçu avec des petites poupées-marionnettes filmées en stop motion. Le réalisateur a pu tester les contraintes en termes de manipulation – la particularité est d’avoir des têtes énormes par rapport aux corps et des yeux immenses très expressifs – et déjà l’idée de cadrer les personnages lors de longs plans.
Puis le Suisse Marx Karli (Rita Productions) a eu l’idée de confier l’adaptation de ce récit, dont il y avait déjà eu plusieurs versions du scénario, à Céline Sciamma. "Le livre était une succession de différents épisodes de la vie de ce petit garçon. Céline a su trouver une trame narrative et dépasser les épisodes", a poursuivi Claude Barras.
Puis le réalisateur a éprouvé le scénario et les situations avec les enfants, en filmant chaque scène dans l’ordre avec eux :"L’idée était d’avoir un répertoire de voix pour incarner ensuite les scènes. Nous avons monté les voix en parallèle du story board et de l’animatic." Le story board initial comptait 700 plans pour au final n’en retenir que 400 : "Nous avons choisi de filmer beaucoup les émotions plutôt que l’action".
En France, la production a trouvé comme partenaire Gebeka Films pour la distribution et Blue Spirit pour la production. Armelle Glorennec de Blue Spirit a craqué sur Ma vie de Courgette au Cartoon Movie en 2012 : "Le pilote était un parfait condensé du projet, avec déjà l’importance des dialogues, l’approche du cadre serré sur les personnages, la simplicité du graphisme et un équilibre entre rire et émotion." Elle a ensuite résumé le défi de cette production : "Comment produire un film en volume animé en France, sans sous-traitance, avec 40 décors pour un budget de 5,3 M€ qui en a coûté au final 6,3 M€ ?"
"Nous avons constamment combiné les contraintes artistiques, esthétiques et budgétaires, pour trouver des solutions créatives. Ça n’a pas été facile", a confié le réalisateur. Par exemple, pour tenter de rationaliser les étapes, l’équipe a cherché un système pour que les personnages puissent cligner des yeux sans passer trop de temps à chaque changement d’expression. "Nous avons démarré le tournage en filmant 2 secondes par jour, nous avons fini à 5 secondes par jour."
Il y avait peu d’intermédiaires entre le réalisateur et l’équipe et pas de direction artistique confiée à une seule personne : "Chaque chef de poste conduisait la direction artistique et chacun a aussi composé son équipe."
Pour la création des personnages, Claude Barras est allé chercher Grégory Beaussart, un spécialiste des marionnettes : "Le pilote a révélé les problématiques. Le travail était très artisanal pour la fabrication des marionnettes. Pour un long métrage, nous nous sommes orientées sur de nouvelles problématiques pour faire en sorte que les marionnettes aient une plus grande longévité et soient plus manipulables." Lui et son équipe ont utilisé l’impression 3D qui leur a permis d’optimiser la légèreté de la tête par rapport à son surdimensionnement, mais aussi pour obtenir les bouches et les paupières des personnages. "Le challenge était d’optimiser les marionnettes pour les animateurs afin de perdre le moins de temps possible ensuite sur le plateau de tournage." Chaque marionnette devant être maquillée et nettoyée tous les jours ! Elles étaient composées de silicone, de mousse polyuréthane et de résine.
David Toutevoix, le chef opérateur volume, a filmé sur neuf plateaux au départ et quinze au final, en utilisant un Canon 5D avec comme contrainte un tournage échelle réduite et des profondeurs de champs réduites.
Enfin, la chef animatrice Kim Keukeleire a raconté comment elle avait longuement préparé avec Claude Barras pour trouver le style de l'animation, "naturaliste, ni réaliste ni cartoon". Elle s’est appuyée sur les enregistrements des enfants et s’est beaucoup concentrée sur les détails pour retranscrire les émotions à travers ce que racontent les corps : les yeux, les mains notamment. Elle s’est entourée d’une équipe d’animateurs tous expérimentés, de nombreuses nationalités, et cela afin de pouvoir travailler rapidement.
Le tournage du film qui s’est achevé il y a deux mois s’est déroulé dans les studios Pixel à Villeurbanne. Actuellement en postproduction, il sera terminé d’ici octobre-novembre 2015. La sortie n’est pas encore datée.
Sarah Drouhaud
© crédit photo : Rita Gébéka Blue SpiritVous avez déjà un compte
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