Congrès FNCF 2016 - Après-VPF : La FNCF demande le maintien d’un outil financier
Comme la veille lors du Forum de discussions, les thèmes de l’après-VPF, de l’art et essai ainsi que du piratage étaient au cœur du débat avec les pouvoirs publics au 71e Congrès de la FNCF. La demande du maintien d'un outil financier après la fin des VPF a été mal reçue par les distributeurs.
En ouverture de ce traditionnel rendez-vous avec les pouvoirs publics, Richard Patry, le président de la FNCF, est revenu sur l’année écoulée, marquée par les évènements dramatiques qu’a subis le pays. Au moment des attentats, “les exploitants ont assumé leur responsabilité, en restant rester ouverts mais en renforçant les contrôles, en diffusant des messages de solidarité. Nos cinémas ont contribué à la solidarité. Les salles sont le lieu de l’émotion partagée, le lieu de découverte des œuvres, le lieu de l’ouverture sur les autres. Malgré ces évènements, le public est revenu massivement et rapidement. Aller au cinéma fait partie de la vie des gens, ne plus y aller serait céder au terrorisme. Aller au cinéma c’est marquer sa résistance face à la barbarie”.
L’Après-VPF : la FNCF demande le maintien d’un outil financier pour réguler les sorties
Le président de la FNCF a ensuite évoqué les points positifs de l’année écoulée. Une fréquentation qui se maintient largement au-delà 200 millions d’entrées, une filière de l’exploitation qui investit beaucoup dans notre territoire pour que la France dispose toujours du plus beau parc de salles au monde, et un grand nombre de points soulevés par la petite exploitation à Deauville en 2015 qui ont été pris en compte par les pouvoirs publics (accords pour les films art et essai porteurs, publication de la recommandation de la Médiatrice sur les salles monoécrans notamment).
Puis, il a enchaîné avec les préoccupations de la filière exploitation. Outre sa réponse aux demandes de Canal+ pour faire évoluer la chronologie des médias, déjà largement faite au cours de ce 71e Congrès, il a évoqué le maintien de la fréquentation et rappelé qu’il n’était absolument pas homogène et que la baisse du marché parisien était un sujet d’inquiétude.
Puis il a abordé le sujet phare de ce 71e Congrès, celui de l’après-VPF, alors que d’ici deux ans, l’ensemble du parc de salles hexagonales aura atteint le plafond d’amortissement pour l’équipement numérique. Se pose désormais, pour la FNCF, la question de l’équilibre économique des salles – alors qu’exploiter un film en numérique coûte plus cher et que l’obsolescence des projecteurs est plus rapide –, et de la régulation des sorties. “Le numérique a profondément modifié la structure du bilan des salles. Elles doivent bénéficier de financements nouveaux pour assurer le renouvellement du matériel, en plus du reste”, a-t-il plaidé, ajoutant que “dans un monde où la copie sera quasi gratuite, il y a un risque de phénomène inflationniste dans les plans de sorties des films”.
Pour le président de la FNCF, “même s’il n’a pas été conçu pour cela, le VPF est devenu un outil de régulation”. La FNCF milite en faveur d’un outil financier de régulation de la mise sur le marché des copies, doté d’un fonds de péréquation pour les investissements numériques.
Revenant ensuite sur une année marquée par “la poursuite éprouvante des Assises (du cinéma)”, qui a abouti à l’accord en mai sur les engagements de programmation et de diffusion, Richard Patry a déclaré que ce cercle des Assises “n’est plus adapté à la poursuite des travaux sur l’après-VPF”. Il a expliqué que les longues heures à écouter les auteurs, les producteurs, les distributeurs, etc. “nous donner des leçons sur notre métier” ne réglaient pas derrière le vrai problème, qui est, selon la FNCF, celui du nombre de sorties de films par semaine. Il a de plus demandé au CNC de proposer une méthode efficace pour faire avancer ce sujet.
Après avoir évoqué de nombreux autres sujets, la présidente du CNC, Frédérique Bredin, lui a répondu que “certes, les discussions au sein des Assises étaient parfois longues et difficiles mais les débats, souvent passionnants, ont permis d’aboutir collectivement à l’accord historique, équilibré” de mai dernier sur les engagements de programmation et de diffusion, qui a notamment répondu aux problématiques des moyenne et petite exploitations. Elle a aussi rappelé que la fin des VPF était programmée par la loi, qui n’a pas prévu de les remplacer par quoi que ce soit. Conformément à la feuille de route tracée par la ministre de la Culture sur le sujet, l'après-VPF sera discuté au sein des Assises. Le CNC a toutefois entendu la question du coût de maintenance du matériel de projection et il a annoncé le lancement d‘un audit économique et technique sur ce sujet.
Malaise des distributeurs face à la demande de la FNCF sur l’après-VPF
Dans la salle, Victor Hadida, président de la Fédération nationale des distributeurs français, a pris la parole pour faire par d’un “grand malaise sur débat de l’après-VPF” après les déclarations de Richard Patry : “En 2010, il y avait un gentlemen agreement, un accord tacite distribution-exploitation selon lequel s’il y avait des économies générées par le numérique, les distributeurs accepteraient de financer de manière provisoire une rupture technologique, ce qui a permis de préserver tissu des salles. Mais il y a un léger malaise quand on nous parle aujourd’hui de transfert de charges. Alors qu’au départ il s’agissait de financement d’une rupture technonologique, aujourd’hui il s’agirait de financer les charges de certaines salles ?”
Pour lui, une “taxe pérenne sur le numérique serait une rupture fondamentale de ce qu’était le pacte de 2010 porté auprès de la représentation nationale. À l’époque, ce n’était pas un outil régulation de la diffusion, or on entend le contraire aujourd’hui. Depuis 2010, nous n’avons pas impression qu’il y a eu une massification des plans de sorties. Et si c’était le cas, il faudrait peut-être trouver de solution, mais celle-ci ne serait pas de taxer des sorties”.
Richard Patry lui a répondu que depuis 2009, au moment de la préparation de la loi, “les choses ont changé, nous n’avions pas vu une telle déstructuration de nos bilans. Vous avez réalisé des économies, nous avons des charges supplémentaires”.
Frédérique Bredin est également intervenue pour souligner que la “situation de la distribution indépendante en France est très problématique. Elle prend des risques considérables et il y a un risque de voir ceratins acteurs disparaître”, a-t-elle précisé, appuyant ainsi la position des distributeurs.
Revalorisation de l’aide aux cinémas art et esssai
Sur la réforme de l’art et essai, autre thème phare de ce 71e Congrès et de ce débat, la FNCF a insisté sur le fait qu’aucune salle ne devait être exclue par les mesures qui seraient prises, notamment celles de la moyenne exploitation. Elle a aussi rappelé le problème des retard du versement des aides art et essai par le CNC, à la suite d’un problème informatique.
La présidente du CNC a rassuré sur ces points, indiquant que l’objectif de la réforme de l’art et essai à la suite du rapport Raude était notamment une simplification du classement art et essai et non pas une exclusion des salles. “Il s’agit au contraire d’une réforme qui tire toutes les salles vers le haut.” Preuve de l’attachement du Centre à ces salles “qui font un travail formidable”, Frédérique Bredin a annoncé une “augmentation conséquente” du soutien financier à l’art et essai en 2017. Quant aux problèmes rencontrés en 2016 pour le versement des aides, elle s’est engagée à ce que les aides 2017 soient versées à la mi-juin au plus tard. Enfin, dans le sens de la simplification, elle a rappelé que les procédures de classement auront lieu tous les ans, et non plus tous les deux ans.
Lutte contre le piratage : Nicolas Seydoux appelle les exploitants à sensibiliser leurs élus
S’il y a un sujet qui fait l’unanimité dans toute la filière cinéma, c’est bien en revanche celui du piratage. Pour clore ce débat avec les pouvoirs publics, la parole a été donnée comme chaque année au président de l’Alpa, Nicolas Seydoux, qui n’a pu que constater que ce fléau n’avait pas été endigué. Certes, depuis le discours du premier ministre Manuel Valls, en septembre 2014, “les pouvoirs publics se sont légèrement engagés à l’égard des acteurs majeurs de la lutte contre le piratage. Les grands annonceurs ne sont plus sur sites pirates français et les régies françaises ne participent plus à ces actions. Mais on ne voit pas le téléchargement baisser. Même s’il n’a pas augmenté. Un tiers des Français depuis trois ans téléchargent de façon massive“, a-t-il souligné. Si l’ensemble de la profession sur ce sujet est donc solidaire, il a aussi estimé que les élus de l’Assemblée nationale et du Sénat ne s’intéressent pas au téléchargement illicite. Il a précisé que, contrairement à la précédente campagne de 2012, il n’alerterait pas les candidats à la présidentielle sur le sujet, estimant qu’il serait balayé face aux problèmes de l’emploi et de la sécurité dans le pays. En revanche, il reprendra son bâton de pèlerin dès le lendemain du résultat, pour alerter le futur locataire de l’Élysée.
Éducation à l’image et collectivités territoriales
La FNCF a demandé au CNC de prendre en compte dans ses futures conventions État-régions le financement du transport des élèves pour les dispositifs d’éducation à l’image, face au désengagement des départements. Sur l’éducation à l’image, la FNCF a aussi déploré aussi que la mise en place de ciné-clubs dans les lycées ne se fasse pas avec les salles et en complément des dispositifs existants. Il a ainsi demandé une concertation sur le sujet. Frédérique Bredin, qui a insisté sur son attachement à l'éducation au cinéma en général, s’est montrée ouverte à cette demande. Elle a aussi précisé que le dispositif Collèges au cinéma était en baisse depuis une dizaine d’années, alors qu’Écoles au cinéma et Lycées au cinéma sont en croissance. Elle a également noté que si les régions sont compétentes pour les transports scolaires, elles n’ont toutefois pas la responsabilité du transport culturel. Les exploitants ont donc intérêt, selon elle, à alerter leur département “pour rappeler l’importance primordiale de ce dispositif pour les élèves”. Le CNC le fera dans le cadre de ces conventions sachant qu’il n’en signe qu’avec 10 départements, le reste étant avec les régions.
La présidente du CNC a enfin rappelé que les nouvelles conventions État-régions comprendront pour la première fois des aides aux salles en finançant des emplois de médiateurs pour le travail d’animation des salles, à travers le 1 € pour 2 €.
Sarah Drouhaud
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