Lumière MFC 2016 - Laurent Cormier : “L’économie du cinéma classique est encore fragile”
Alors que la 4e édition du Marché du film classique ouvre ses portes, le directeur du patrimoine cinématographique du CNC fait un point d'étape du plan de numérisation, évoque l’avenir après son arrêt et livre son analyse du marché.
Avant toute chose, pouvez-vous nous livrer un bref bilan du plan de numérisation à ce jour ?
De juillet 2012 à juillet 2016, soit en quatre ans, nous comptons 713 films aidés pour 45 M€ d’aides. 109 ayants-droit et 29 prestataires français et européens sont concernés.
Quels constats pouvez-vous tirer quant aux dossiers déposés ?
Un choix très large, des films de très forte notoriété (Hôtel du Nord, Le salaire de la peur, Manon des sources, La grande vadrouille…) comme des films moins connus du public, d’époques très diverses, mais tous extrêmement intéressants sur le plan patrimonial. Après, il reste encore beaucoup à faire.
Quels conseils pratiques pouvez-vous fournir aux porteurs de projets ?
Bien vérifier l’état des éléments d’origine et la chaîne de droits avant de déposer des demandes ! Trop de dossiers sont retardés pour ces raisons.
L’an dernier, vous avez assuré, lors d’une table ronde au Marché du film classique que le plan de numérisation était pérennisé jusqu’en 2017. Qu’est-il prévu pour après ?
C’est en effet la grande question ! La “réserve numérique” du CNC atteint ses limites et il nous faut envisager d’autres solutions de financement, comme l’appel au mécénat par exemple. Différentes pistes sont à l’étude, un peu tôt aujourd’hui pour apporter les réponses.
Quel regard portez-vous sur le marché hexagonal du cinéma classique et de patrimoine cette année ?
Une année très riche, avec de belles restaurations, une maturité et une maîtrise des processes technologiques, avec des moyens de diffusion qui n’ont jamais été aussi nombreux et de qualité. Le développement très riche de la Cinétek, que soutient le CNC, en est un bel exemple, comme peuvent l’être Tënk, qui est une réelle ouverture pour le patrimoine documentaire, ou la plateforme de recherche de financement consacrée au patrimoine du cinéma Celluloid Angels.
Le secteur en lui-même est très actif : re-sorties en salle avec un travail efficace de l’ADRC (diffusions à la télévision) – saluons à cet égard le rôle d’Arte – ; mises en ligne et éditions DVD/Blu-ray ; programmations en festival, on dénombre d’ailleurs 19 films aidés par le CNC au Festival Lumière ; et dans les cinémathèques. L’économie de tout cela est cependant encore fragile, ce qui est un frein pour nombre d’ayants-droit.
Et redonner vie à un film classique implique une vraie stratégie d’accompagnement auprès d’un public qui est souvent en situation de découverte du film et n’ira pas spontanément vers lui. Les festivals comme le Festival Lumière, Toute la mémoire du monde ou Zoom Arrière, pour ne citer que les plus importants, et d’autres manifestations de promotion dans ce domaine comme Play It Again, montrent, si besoin est, qu’il faut aller chercher le public, que le succès se construit progressivement et ne se dément pas.
Propos recueillis par Sylvain Devarieux
© crédit photo : DRVous avez déjà un compte
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