Annecy 2017 - Patrick Eveno : "Nous sommes devenus un carrefour"
Date de publication : 17/06/2017 - 08:45
Alors que le Mifa a refermé ses portes vendredi 16 juin, et que le Festival fera de même dans quelques heures, le directeur de la Cité de l’image en mouvement, l'organisateur d'Annecy, livre le bilan à chaud d'une édition exceptionnelle en tous points.
Cette édition a été marquée par des évolutions déterminantes pour l’avenir d’Annecy, sur le marché notamment, qui a gagné un jour et un étage. Avec quel bilan à ce stade ?
Je pense que le pari est gagné. Concernant l’étage supplémentaire, le constat était pour une grande part fait avant, puisque les surfaces avaient été commercialisées. Il restait à voir comment cette structure, qui sur le plan nous séduisait, fonctionnerait. Je n’ai pas eu de récriminations à cette heure ! Et j’ai le sentiment que, d’une part, c’était aussi confortable qu’auparavant et que, d’autre part, les sociétés qui avaient pu être déplacées y ont trouvé leur compte. Il n’y avait pas moins de monde dans cette configuration que dans la précédente, ce qui a pu être une crainte exprimée à un moment.
Après, nous savons qu’il y a des petites améliorations à apporter, mais c’est une grande satisfaction. Nous savons aussi que si l’on juge qu’il faut rajouter des surfaces supplémentaires, nous pourrons le faire. Le chapiteau de l’étage ne couvrant pas toute la surface du rez-de-chaussée. Nous ne serons donc pas freinés en cas de croissance éventuelle.
Savez-vous déjà si ce sera le cas ?
L’équipe du Mifa a le sentiment que oui. Il n’est donc pas impossible que nous étendions encore la superficie. Quant à la journée du mardi, ce ne sont pas les quelques conversations que j’ai eues qui peuvent représenter un sondage, mais j’ai rencontré de nombreuses personnes qui nous disaient, et c’est ce qu’on espérait, "ça nous a donné de l’air et permis de retrouver un peu d’aise dans notre emploi du temps".
Nous, cette journée nous a permis de mieux éditorialiser certaines choses, comme le Mifa Campus qui était un peu éparpillé et qui est devenu plus clair en le positionnant le mardi. C’est donc là aussi satisfaisant. Par ailleurs, nous avons constaté que des professionnels continuaient à arriver le mercredi par manque d’information. Tout ça s’ajustera avec le temps. En attendant, nous n'avons aucun regret d’avoir pris ces décisions qui étaient quand même un pari. Y compris financièrement. Il y avait une prise de risques. Je ne vois pas ce qui pourrait remettre en question ces changements.
Le Mifa Campus sera donc reconduit, son parrain Guillermo del Toro s’installant à Annecy tant il semble conquis par l’événement où il est revenu pour la deuxième année consécutive ?
(Rires) Non je n’ai pas d’information de ce type, mais de toute évidence, il aime beaucoup Annecy !
Quel bilan faites-vous également du rapatriement des conférences à l’Impérial Palace ?
Manifestement, l’affluence était bonne et j’ai là aussi eu pas mal de témoignages sur le fait que les gens pouvaient s’y rendre entre deux rendez-vous. C’est trop tôt pour dire s’il y avait plus d’allées et venues... Ces salles sont aussi maintenant celles des conférences de presse et je sais que France Télévisions était fort heureux de ce changement par exemple, de par les conditions de projections, la capacité d’accueil…
Quels sont les chiffres de fréquentation à ce stade ?
Nous avons atteint les 10 000 accrédités, soit une hausse de 8,7% sur l’ensemble de la manifestation, et au Mifa, ils ont dépassé les 3 000, ce qui correspond à une croissance de 9,2%. Tous les chiffres n’étant pas forcément encore remontés à l’heure où je vous parle, ils sont donc provisoires.
C’est au-delà de vos espérances ?
On en rêvait un peu et Annecy l’a fait. Ce chiffre porte une symbolique assez forte. Il n’y a pas si longtemps que ça, nous étions à 5 000. La progression continue à être spectaculaire depuis trois ans. C’est absolument incroyable. Et chaque festivalier que j’ai pu croiser, comme les participants au Mifa, constatait de visu qu’il y avait beaucoup plus de monde.
Guest du Mifa, Xavier Bertrand, déterminé à hisser les Hauts-de-France dans le quatuor de tête des régions en terme d'animation, a plaidé pour une coopération entre les régions plutôt qu’une compétition. Est-il naïf ? Plus généralement, comment observez-vous ce qui se trame en région ?
Pour l’avoir côtoyé à une ou deux reprises, je ne qualifierai pas Xavier Bertrand de naïf. De même, je ne pense pas qu’il ne se rende pas compte qu’il y ait une concurrence, et qu'elle va s’exercer clairement. Je pense qu’il est plutôt dans une volonté de non-agression. Son ambition, qui est celle de la région Hauts-de-France, semble se traduire, à mon avis, par une offre forte, à la fois dans les moyens consacrés et dans la place que ça occupe dans une politique régionale de nature à faire avancer son projet. Il a eu bien raison de venir ici le défendre.
Ces présences, comme celle exceptionnelle que nous avons vécue l’an dernier (avec la venue du chef de l’État, François Hollande, Ndlr), et cette année Xavier Bertrand, le maire de Roubaix (où est installé le studio Ankama, Ndlr), mais aussi l’ambassadrice d’Israël, une très forte délégation ukrainienne avec le ministre de la Culture… tendent à démontrer qu’Annecy est devenu au fil du temps un carrefour, où des décideurs de tous ordres viennent à la fois chercher des informations et délivrer des messages.
Annecy, c’est là que ça se passe ?
Et bien oui, j’ai l’impression, et je ne peux que m’en réjouir.
Hors de nos frontières cette fois, cette édition a été marquée par deux annonces de taille : la création du Annecy Asia International Animated Film Festival, attendu à Séoul en 2019, et le lancement d’Animation is Film, festival de film d’animation à Los Angeles qui aura lieu en octobre. Qu’est-ce qui préside à tous ces développements ?
Il s’agit d’une volonté, peut-être pas tellement exprimée en public, que nous avions depuis un moment, à savoir déployer la marque et le savoir-faire d’Annecy à l’international. Ces dernières années, nous avons travaillé sur différents projets qui n’ont pas finalement pas abouti. Sûrement parce que ce n’était pas la bonne opportunité, mais aussi parce que nous n’étions pas en ordre de marche pour y répondre. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec ces deux événements dont la concordance est importante car elle dit au moins une chose commune : Annecy, le nom de la ville et de l’événement, apparaît désormais comme une marque, un label de qualité, que certains organisateurs souhaitent voir afficher comme telle quand ils réfléchissent à un nouvel événement. Il n’y a pas plus grande satisfaction que ça. Ces deux projets sont de nature vraiment différente mais ils disent bien ce nous souhaitons faire.
Concernant Séoul, prévu à un horizon 2019, il s’agit d’être un acteur majeur de la création d’un festival grand public, reprenant notamment tous les éléments de plein air d’Annecy auxquels s’adjoindraient des éléments plus professionnels de type conférences, masterclasses…
Donc pas vraiment un marché ?
Surtout pas ! On scierait la branche sur laquelle on est assis. Un festival, c’est autre chose. Le projet de Los Angeles est arrivé beaucoup plus récemment. Et c’est pour nous une énorme surprise de voir des acteurs du cinéma d’Hollywood venir chercher Annecy. Ça dépasse ce qu’on espérait. Celui-ci aura lieu dès 2017, avec un apport éditorial de notre part, entre les mains de Marcel Jean (délégué artistique du Festival, Ndlr). Il nous faut maintenant réussir tout ça. C’est le nouveau challenge. Il marque une étape vraiment intéressante du projet Citia.
D’un point de vue pratique, comment mènerez-vous tous ces nouveaux développements ? L’équipe sera-t-elle amenée à s’étoffer ?
Sur Los Angeles, comme je le disais, c’est un travail qui va surtout être mené par Marcel et l’équipe films. Cela impactera sans doute la communication car nous ferons en sorte que ça se sache. Nous verrons donc avec quelles conséquences. Il n’y a pas de deal financier autour de Los Angeles. Alors qu’à Séoul, oui. Il s'agit de deux modèles économiques différents.
Pour le second, nous travaillerons dans un premier temps en faisant appel à des consultants extérieurs, chargés d’une mission pendant X mois sur l’élaboration de ce que doit être cette manifestation, en préciser les moyens, les conditions… Parallèlement, nous travaillerons avec des avocats sur des questions juridiques loin d’être à négliger puisqu’il s’agit de la cession de la marque. L’objectif est de démarrer à l’automne. Ensuite, si tout se développe comme nous le souhaitons, alors oui, il faudra renforcer l’équipe.
J’ajoute que la question des dates est très importante. Nous n’aurions pas dit oui à un événement en avril. Il faut que ce soit consécutif à Annecy, qu’il y ait l’idée d’une suite. Pour Los Angeles par exemple, soit les longs auront été vus ici, soit ils sortiront à l’automne ou à Noël, et par conséquent, il n’auront plus de sens pour juin suivant.
Je pense que le pari est gagné. Concernant l’étage supplémentaire, le constat était pour une grande part fait avant, puisque les surfaces avaient été commercialisées. Il restait à voir comment cette structure, qui sur le plan nous séduisait, fonctionnerait. Je n’ai pas eu de récriminations à cette heure ! Et j’ai le sentiment que, d’une part, c’était aussi confortable qu’auparavant et que, d’autre part, les sociétés qui avaient pu être déplacées y ont trouvé leur compte. Il n’y avait pas moins de monde dans cette configuration que dans la précédente, ce qui a pu être une crainte exprimée à un moment.
Après, nous savons qu’il y a des petites améliorations à apporter, mais c’est une grande satisfaction. Nous savons aussi que si l’on juge qu’il faut rajouter des surfaces supplémentaires, nous pourrons le faire. Le chapiteau de l’étage ne couvrant pas toute la surface du rez-de-chaussée. Nous ne serons donc pas freinés en cas de croissance éventuelle.
Savez-vous déjà si ce sera le cas ?
L’équipe du Mifa a le sentiment que oui. Il n’est donc pas impossible que nous étendions encore la superficie. Quant à la journée du mardi, ce ne sont pas les quelques conversations que j’ai eues qui peuvent représenter un sondage, mais j’ai rencontré de nombreuses personnes qui nous disaient, et c’est ce qu’on espérait, "ça nous a donné de l’air et permis de retrouver un peu d’aise dans notre emploi du temps".
Nous, cette journée nous a permis de mieux éditorialiser certaines choses, comme le Mifa Campus qui était un peu éparpillé et qui est devenu plus clair en le positionnant le mardi. C’est donc là aussi satisfaisant. Par ailleurs, nous avons constaté que des professionnels continuaient à arriver le mercredi par manque d’information. Tout ça s’ajustera avec le temps. En attendant, nous n'avons aucun regret d’avoir pris ces décisions qui étaient quand même un pari. Y compris financièrement. Il y avait une prise de risques. Je ne vois pas ce qui pourrait remettre en question ces changements.
Le Mifa Campus sera donc reconduit, son parrain Guillermo del Toro s’installant à Annecy tant il semble conquis par l’événement où il est revenu pour la deuxième année consécutive ?
(Rires) Non je n’ai pas d’information de ce type, mais de toute évidence, il aime beaucoup Annecy !
Quel bilan faites-vous également du rapatriement des conférences à l’Impérial Palace ?
Manifestement, l’affluence était bonne et j’ai là aussi eu pas mal de témoignages sur le fait que les gens pouvaient s’y rendre entre deux rendez-vous. C’est trop tôt pour dire s’il y avait plus d’allées et venues... Ces salles sont aussi maintenant celles des conférences de presse et je sais que France Télévisions était fort heureux de ce changement par exemple, de par les conditions de projections, la capacité d’accueil…
Quels sont les chiffres de fréquentation à ce stade ?
Nous avons atteint les 10 000 accrédités, soit une hausse de 8,7% sur l’ensemble de la manifestation, et au Mifa, ils ont dépassé les 3 000, ce qui correspond à une croissance de 9,2%. Tous les chiffres n’étant pas forcément encore remontés à l’heure où je vous parle, ils sont donc provisoires.
C’est au-delà de vos espérances ?
On en rêvait un peu et Annecy l’a fait. Ce chiffre porte une symbolique assez forte. Il n’y a pas si longtemps que ça, nous étions à 5 000. La progression continue à être spectaculaire depuis trois ans. C’est absolument incroyable. Et chaque festivalier que j’ai pu croiser, comme les participants au Mifa, constatait de visu qu’il y avait beaucoup plus de monde.
Guest du Mifa, Xavier Bertrand, déterminé à hisser les Hauts-de-France dans le quatuor de tête des régions en terme d'animation, a plaidé pour une coopération entre les régions plutôt qu’une compétition. Est-il naïf ? Plus généralement, comment observez-vous ce qui se trame en région ?
Pour l’avoir côtoyé à une ou deux reprises, je ne qualifierai pas Xavier Bertrand de naïf. De même, je ne pense pas qu’il ne se rende pas compte qu’il y ait une concurrence, et qu'elle va s’exercer clairement. Je pense qu’il est plutôt dans une volonté de non-agression. Son ambition, qui est celle de la région Hauts-de-France, semble se traduire, à mon avis, par une offre forte, à la fois dans les moyens consacrés et dans la place que ça occupe dans une politique régionale de nature à faire avancer son projet. Il a eu bien raison de venir ici le défendre.
Ces présences, comme celle exceptionnelle que nous avons vécue l’an dernier (avec la venue du chef de l’État, François Hollande, Ndlr), et cette année Xavier Bertrand, le maire de Roubaix (où est installé le studio Ankama, Ndlr), mais aussi l’ambassadrice d’Israël, une très forte délégation ukrainienne avec le ministre de la Culture… tendent à démontrer qu’Annecy est devenu au fil du temps un carrefour, où des décideurs de tous ordres viennent à la fois chercher des informations et délivrer des messages.
Annecy, c’est là que ça se passe ?
Et bien oui, j’ai l’impression, et je ne peux que m’en réjouir.
Hors de nos frontières cette fois, cette édition a été marquée par deux annonces de taille : la création du Annecy Asia International Animated Film Festival, attendu à Séoul en 2019, et le lancement d’Animation is Film, festival de film d’animation à Los Angeles qui aura lieu en octobre. Qu’est-ce qui préside à tous ces développements ?
Il s’agit d’une volonté, peut-être pas tellement exprimée en public, que nous avions depuis un moment, à savoir déployer la marque et le savoir-faire d’Annecy à l’international. Ces dernières années, nous avons travaillé sur différents projets qui n’ont pas finalement pas abouti. Sûrement parce que ce n’était pas la bonne opportunité, mais aussi parce que nous n’étions pas en ordre de marche pour y répondre. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec ces deux événements dont la concordance est importante car elle dit au moins une chose commune : Annecy, le nom de la ville et de l’événement, apparaît désormais comme une marque, un label de qualité, que certains organisateurs souhaitent voir afficher comme telle quand ils réfléchissent à un nouvel événement. Il n’y a pas plus grande satisfaction que ça. Ces deux projets sont de nature vraiment différente mais ils disent bien ce nous souhaitons faire.
Concernant Séoul, prévu à un horizon 2019, il s’agit d’être un acteur majeur de la création d’un festival grand public, reprenant notamment tous les éléments de plein air d’Annecy auxquels s’adjoindraient des éléments plus professionnels de type conférences, masterclasses…
Donc pas vraiment un marché ?
Surtout pas ! On scierait la branche sur laquelle on est assis. Un festival, c’est autre chose. Le projet de Los Angeles est arrivé beaucoup plus récemment. Et c’est pour nous une énorme surprise de voir des acteurs du cinéma d’Hollywood venir chercher Annecy. Ça dépasse ce qu’on espérait. Celui-ci aura lieu dès 2017, avec un apport éditorial de notre part, entre les mains de Marcel Jean (délégué artistique du Festival, Ndlr). Il nous faut maintenant réussir tout ça. C’est le nouveau challenge. Il marque une étape vraiment intéressante du projet Citia.
D’un point de vue pratique, comment mènerez-vous tous ces nouveaux développements ? L’équipe sera-t-elle amenée à s’étoffer ?
Sur Los Angeles, comme je le disais, c’est un travail qui va surtout être mené par Marcel et l’équipe films. Cela impactera sans doute la communication car nous ferons en sorte que ça se sache. Nous verrons donc avec quelles conséquences. Il n’y a pas de deal financier autour de Los Angeles. Alors qu’à Séoul, oui. Il s'agit de deux modèles économiques différents.
Pour le second, nous travaillerons dans un premier temps en faisant appel à des consultants extérieurs, chargés d’une mission pendant X mois sur l’élaboration de ce que doit être cette manifestation, en préciser les moyens, les conditions… Parallèlement, nous travaillerons avec des avocats sur des questions juridiques loin d’être à négliger puisqu’il s’agit de la cession de la marque. L’objectif est de démarrer à l’automne. Ensuite, si tout se développe comme nous le souhaitons, alors oui, il faudra renforcer l’équipe.
J’ajoute que la question des dates est très importante. Nous n’aurions pas dit oui à un événement en avril. Il faut que ce soit consécutif à Annecy, qu’il y ait l’idée d’une suite. Pour Los Angeles par exemple, soit les longs auront été vus ici, soit ils sortiront à l’automne ou à Noël, et par conséquent, il n’auront plus de sens pour juin suivant.
Propos recueillis par Emmanuelle Miquet
© crédit photo : G-Piel
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