Annecy 2020 online - Marcel Jean : "La sélection finale correspond à plus de 95% à ce que nous aurions présenté en temps normal"
Pour l'ouverture ce lundi 15 juin de 44e édition du Festival international du film d'animation d'Annecy, dématérialisée sous la contrainte de la crise sanitaire, son délégué artistique revient sur le challenge d’organisation et les enjeux de la sélection de ce cru 2020.
Quelles ont été les contraintes de la sélection et quelles sont les contraintes d’organisation de cette édition du festival d'Annecy dématérialisée ?
La sélection était déjà très avancée lorsque la pandémie a été déclarée. Le résultat final correspond à plus de 95% à ce que nous aurions présenté en temps normal. L’essentiel des différences concerne les films que nous avons sélectionnés avant qu’ils soient terminés et qui n’ont pu être complétés à cause du confinement. Quant au reste, seuls un court métrage et un long métrage se sont retirés de la compétition. Du côté des contraintes d’organisation, elles sont assez évidentes : Annecy est un festival de rencontres et celles-ci n’auront pas lieu de la même façon. J’ajouterai que la principale contrainte que nous nous sommes donnés dans l’organisation de l’événement a été notre volonté de ne pas "géobloquer" la diffusion des films. Pour nous, le "géoblocage" n’était pas une option : Annecy n’est pas un événement franco-français, c’est un événement international. Un festivalier en Nouvelle-Zélande ou au Chili a pour nous la même valeur qu’un festivalier parisien.
Quel pourcentage de films de la sélection seront visibles dans leur intégralité ? Pensez-vous les extraits et documentaires de présentation suffisants pour que le public puisse se faire l’idée d’une œuvre ?
Au total, 12 longs métrages pourront être vus par les festivaliers dans leur intégralité. C’est donc 60% de la sélection de longs métrages qui leur seront offerts. Dans le reste des sections, c’est 100% de la sélection qui sera visible. C’est une offre énorme !
Cette semaine j’ai vu le documentaire de présentation de Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary de Rémi Chayé. C’est exceptionnel ! Un documentaire passionnant qui retrace la genèse de ce film et expose la démarche artistique dans sa globalité.
Que retiendrez-vous de cet opus digital pour les futures éditions ?
Il y a des zones que nous n’avons pas exploité par le passé et que nous devrons garder actives dans l’avenir. Je pense ainsi qu’on peut offrir davantage de contenu en ligne en périphérie du festival. Lors de mon arrivée à Annecy à l’été 2012, j’ai beaucoup parlé d’un "Annecy en ligne". Pour toutes sortes de raisons, cela ne s’est jamais vraiment concrétisé. Je pense qu’il est temps de ré-imaginer cette dimension du festival et lui donner une véritable envergure. Annecy, c’est les festivaliers qui débarquent, mais c’est aussi une communauté, un réseau que nous pouvons maintenir plus actif.
Un commentaire sur la sélection officielle de cette année, des tendances s’en dégagent ?
Tous sections confondus, je dirai que le thème de l’apocalypse y est très présent, tant littéralement que métaphoriquement. Je penser à des courts métrages comme Physique de la tristesse de Theodore Ushev ou Empty Spaces de Geoffroy de Crécy, je pense à la série télévisée The Midnight Gospel, je pense aussi au long métrage My Favorite War d’Ilze Burkovska-Jacobsen (où il y a la fin de l’URSS)… Le thème des migrants et celui de l’identité de genre sont aussi très présents. Les cinéastes d’animation vivent dans le même monde que nous !
Envisagez-vous d’autres nouveautés et innovations pour les futures éditions ?
J’ai la conviction que si on n’évolue pas, on dépérit. Nous devons être à l’écoute de l’évolution du milieu et y réagir. Je dirais même plus, nous devons pressentir ce qui se passe et agir avant qu’on nous le demande. C’est comme ça qu’on a créé de nouvelles sections au cours des dernières années. Mon obsession, aujourd’hui, c’est la place faite aux étudiants en compétition. Il faut bonifier l’accueil qu’on leur fait. Il faut rendre leur expérience encore plus marquante. Je pense notamment à une forme de parrainage.
Nous avions prévu, en 2020, de créer un village du festival dans le Haras d’Annecy. Ce n’est que partie remise. En 2019, beaucoup de gens nous disaient qu’Annecy commençait à devenir trop gros. Nous étions déterminés à prendre les moyens pour améliorer l’expérience et créer davantage de convivialité au festival. Ça reste un objectif et nous allons prendre les moyens pour y arriver. Mickael Marin, le directeur de Citia, est un visionnaire. C’est quelqu’un qui a un portrait très clair de ce que peut être Annecy en 2025. C’est extrêmement stimulant de travailler avec quelqu’un comme lui.
Propos recueillis par Sylvain Devarieux
© crédit photo : Gilles-PielVous avez déjà un compte
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