Cinéma

Congrès FNCF 2020 - Le vaste plan de relance pour le cinéma annoncé

Date de publication : 23/09/2020 - 20:00

Après les mesures du plan de relance pour l’audiovisuel présentées le 17 septembre dans le cadre du festival de la fiction à Paris, la ministre de la Culture a dévoilé le 23 septembre au Congrès des exploitants à Deauville celles pour la filière cinématographique, avec, comme attendu, un soutien massif pour les salles.

Après avoir rappelé les mesures d’urgences transversales mises en place par l’Etat pour préserver l’emploi et maintenir trésorerie des entreprises dans la crise sanitaire, puis salué la "mobilisation exceptionnelle du CNC" pour les mesures d’urgence spécifiques mises en place (mobilisation du soutien automatique pour les exploitants, producteurs et distributeurs, suspension puis annulation de la TSA pour un montant d’environ 18M€, création des fonds de solidarité en lien avec la SACD et la Scam qui a bénéficié à 550 auteurs, soutien aux industries techniques pour organiser la production à distance), Roselyne Bachelot a aussi évoqué le mécanisme novateur qu’est le fonds de garantie pour la reprise des tournages, doté de 100M€ (50M€ Etat et 50M€ des assureurs privés mutualistes), qui a permis leur reprise plus tôt qu’ailleurs. Prêt de 250 tournages (cinéma et audiovisuel) ont été garantis par ce fonds.

50M€ pour compenser les pertes de billetterie des salles de cinéma
Dans les annonces nouvelles, la ministre a démarré avec le mécanisme exceptionnel, annoncé par le Premier ministre fin août, de compensation des pertes d’exploitation des salles de spectacles (théâtre, musique) et de cinéma en raison de la situation sanitaire. Sur les 100M€, c’est la moitié, donc 50M€, qui reviendra aux salles de cinéma. Ce mécanisme, géré par le CNC, compensera les pertes de recettes de billetterie qui resterait à charge des exploitants à hauteur 50% pour les cinémas indépendants et de 40% pour les plus grands circuits.
Ils va se traduire par un premier versement de 80% fin octobre avec effet rétroactif au 1er septembre. Le solde de 20% sera alloué début 2021.

Au-delà de ces mesures, "le cinéma fait l’objet d’une attention spécifique dans le cadre de la stratégie de relance que le gouvernement met en œuvre. La Culture est l’un des moteurs de la relance de notre pays. Je me suis battue pour que 2Md€ du plan France Relance y soit consacrés" a dit la ministre. Elle a rappelé que 165 M€ seront affectés au CNC afin de soutenir les filières cinématographique et audiovisuelle dans ce plan, répartis entre une enveloppe de 60 M€ pour réarmer le CNC et ainsi garantir "le maintien à leur niveau actuel de tous les dispositifs d’aide à la création et à la diffusion du CNC" et 105M€ pour la relance.
Ajoutés à 11,5 M€ de redéploiements du CNC amorcés cet été (via les soutiens automatiques distributeurs et producteurs), le CNC va financer un total de 116,5 M€ de mesures, "élaborées en concertation avec les représentants des professionnels du secteur".

34,3 M€ affectés à l’exploitation

Afin de préserver le parc de salles, qui vont être durablement touchées par la crise sanitaire, une part significative du plan est orientée vers elles. Les exploitants vont ainsi recevoir un versement exceptionnel. Il sera équivalent à un an de soutien automatique pour les cinémas indépendants et neuf mois pour les grands réseaux. Soit un total de 30 M€ de subventions.
En outre, ils pourront obtenir des avances sur leur compte de soutien automatique pour couvrir leurs besoins de trésorerie, frais bancaires et pas seulement leurs investissements de modernisation.
Ils bénéficieront de la prolongation d’un an du délai de péremption du soutien automatique.
Pour les salles Art et essai, l’aide sélective sera renforcée de 2 M€ (passant ainsi de 16 à 18M€ en 2021).
Par ailleurs, la dette restante liée à l’aide à la numérisation des salles – l’aide "Cinenum" – sera annulée.

Une attention particulière sera accordée aux séances d’éducation à l’image (1M€). Le CNC va ainsi financer des actions de recrutement et de formation à destination des enseignants pour les encourager à revenir au cinéma avec leurs élèves dans le cadre de programmes pédagogiques.

"Toutes ces mesures traduisent notre engagement à vos côtés. Car quand les salles souffrent, c’est l’ensemble de la filière qui, à terme, est menacée " a commenté Roselyne Bachelot. En contrepartie, elle attend des exploitants qu’ils "contribuent aux réflexions qui s’ouvriront sur la chronologie des médias, sous l’égide du CNC", et qu’ils assurent  "la plus large diffusion des œuvres sur le territoire avec un nombre très significatif de séances", et que le CNC puisse discuter de "l’ensemble de la modernisation de vos engagements de programmation".

12,2M€ pour relancer la production cinéma

Pour favoriser la production de films nouveaux, le soutien pour les producteurs délégués qui investiront leur soutien au cours des 7 prochains mois (octobre 2020 à avril 2021) sera majoré de 25%.

L'enveloppe des aides sélectives (Avance sur recettes, aide au développement) sera augmentée. 

Est prolongée la mesure de majoration des soutien générés pour les films agréés sortis entre le 22 juin et le 1er septembre, puis entre le 1er septembre et le 31 décembre, pour que les producteurs soient incités à sortir les films terminés,

Est prolongé d'un an le délai de péremption des comptes de soutien automatiques des producteurs "afin ne pas pénaliser ceux qui n’ont pu produire au cours du confinement et risquerait ainsi de perdre sans raison leur droit à soutien" selon le CNC.

17,7M€ pour la distribution cinématographique

Pour encourager la sortie des films dans cette période encore perturbée pour plusieurs mois, quatre mesures sont prises.

Comme pour les producteurs, la majoration des soutiens générés entre le 22 juin et le 1er septembre 2020 est prolongée du 1er septembre et le 31 décembre. Pour la seconde période, 1er septembre-31 décembre, le barème est légèrement différent du premier et est dégressif en fonction des entrées.
Le soutien sélectif à la distribution a également été renforcé pour appuyer cet effet de levier.

Les péremptions des comptes automatiques sont repoussées d’un an.

A l’issue de cette période de reprise pour la distribution, les distributeurs sont incités à faire le pari d’œuvres nouvelles (aux côtés des producteurs ci-dessus) à travers des majorations des mobilisations de soutien automatique pour des investissements fléchés en minima garantis (entre janvier et avril 2021).

6M€ pour les "talents"
Par ailleurs, sont fléchés 6 M€ pour accompagner "les talents".
Le CNC va ainsi lancer une nouvelle aide au "programme d’auteur". Elle prévoit, dans une esprit de recherche et développement, un accompagnement artistique et économique au long cours des talents qui bénéficieront de cette aide, afin de favoriser des projets d’écriture originaux et innovants.

Les écoles, et la Fémis en priorité, vont voir leurs moyens renforcés "afin qu’elles contribuent encore davantage au renouvellement du vivier de créateurs qui fait la force du cinéma français".

Et le CNC va lancer une bourse "jeunes talents" à destination d’équipes de jeunes créateurs diplômés en 2020, associant auteurs et producteurs, pour faciliter leur insertion professionnelle en leur permettant de développer des projets qui seront la vitrine de leur savoir-faire.
Le soutien aux nouveaux formats sera également consolidé afin qu’ils puissent pleinement assurer leur fonction de tremplin pour les créateurs émergents.

Enfin, va être lancé un appel à projets pour soutenir des actions de diffusion et de promotion culturelle auprès des 15-25 ans.

1,8M€ pour le Patrimoine
L’aide sélective à l’édition vidéo physique sera majorée afin de soutenir l’investissement des éditeurs dans l’acquisition de droits de films, notamment patrimoniaux, pour un total de 0,8M€.
Le budget des associations et institutions qui assurent la conservation, la promotion et la valorisation de ce patrimoine, comme la Cinémathèque française, sera également renforcé.

10M€ pour les industries techniques
Comme déjà annoncé, les industries techniques vont bénéficier de 10 M€ pour accompagner leur modernisation, à la fois pour l’équipement des outils numériques les plus récents mais aussi l’amélioration de la performance écologique de leurs installations.

8,3M€ pour l’international
La ministre a aussi rappelé, comme elle l'a dit au festival de la fiction, que 8M€ seront consacrés à l’internationalisation de la filière cinématographique et audiovisuelle.
Ainsi sera créée en 2021 la nouvelle Maison de l’export, qui doit fusionner UniFrance et TVFI) en 2021. "Cette nouvelle structure disposera de nouveaux moyens pour soutenir la vente de nos œuvres cinématographiques et audiovisuelles à l’étranger" a –t-elle dit sans plus de précisions.
En outre, le fonds de soutien à la promotion internationale des films sera renforcé et modernisé pour prendre en compte les nouveaux modes de consommation.
L’aide au cinéma du monde sera également renforcée (2M€).
Et, comme déjà dit, de nouveaux moyens seront alloués à la promotion de l’attractivité internationale de la France afin d’attirer des tournages ambitieux.

Autres enjeux d’avenir
Roselyne Bachelot a aussi évoqué les "autres enjeux essentiels pour l’avenir du cinéma français".
En premier lieu l’intégration des plateformes numériques dans le système de financement de la production cinématographique et audiovisuelle française, via la transposition de la directive SMA, intégrée au projet de loi dit "DDADUE" en cours d’examen. Comme elle l’avait dit au festival de la fiction, la ministre s’engage à ce que le nouveau décret SMAD soit prêt à la mi-octobre.
Elle souhaite par aillleurs que la période soit l’occasion d’accélérer les actions "dans les domaines de la parité, à la diversité et au développement durable".
Un autre enjeu sur lequel la ministre a insisté est la reconquête du jeune public.
Enfin, elle a consacré la fin de son allocution au piratage. Après avoir rappelé que l’audience des sites illicites "est passée de 15 millions de visiteurs en mai 2018 à moins de 10 millions en mai 2020" (-30 % en deux ans), Roselyne Bachelot a annoncé, pour sensibiliser notamment les jeunes, la mise en place d’une campagne de communication qui sera diffusée, avant la fin de l'année, dans les salles, à la télévision, dans la presse, sur internet. Cette campagne, financée par l’Hadopi et le CNC, se concrétisera par un spot que Michel Hazanavicius a accepté de réaliser. Il sera complété de vidéos réalisées par des vidéastes du web, diffusées sur les plateformes vidéo. Et elle a terminé par la transposition prochaine de l’article 17 de la directive sur le droit d’auteur, qui responsabilisera les plateformes de partage de vidéos lorsque des oeuvres sont mises en ligne sans l’autorisation des titulaires de droit. Ces plateformes devront "donc tout mettre en oeuvre pour préserver les droits des auteurs"  selon la ministre, qui attend aussi des fournisseurs d’accès qu’ils soient aux côtés des pouvoirs publics dans cette lutte.

Sarah Drouhaud
© crédit photo :


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