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Cinéma

Tribune présidentielle 2022 - "Retrouver l'ambition d'un dessein fondé sur le lien culturel" (François Aymé, Afcae)

Date de publication : 22/03/2022 - 10:00

À l'approche de l'élection présidentielle, Le film français propose aux organisations professionnelles du cinéma et de l'audiovisuel de prendre la parole sur leurs attentes vis-à-vis du prochain quinquennat. Aujourd'hui, François Aymé, président de l'Afcae, dresse les enjeux pour le secteur.

À quelques semaines de la présidentielle, quelques remarques et suggestions de l’Afcae. Sur la méthode, d’abord. Nous sortons d’un quinquennat où le fonctionnement vertical a pu donner le meilleur (le "quoi qu’il en coûte" pour les lieux culturels pendant les fermetures dues à la pandémie) mais également le moins bon (pass Culture première mouture, l’exhortation à nous "ré-in-ven-ter" et maintenant la suppression annoncée de la redevance TV tant par le candidat Macron que par ceux de l’extrême-droite). Nous recommandons aux candidats de déléguer la régulation du cinéma au CNC (ce qui a pu donner en 2017 le financement, avec certaines régions, de postes de médiateurs cinéma ou en 2021 la création du fonds Jeunes cinéphiles) et de déléguer aux organisations professionnelles les négociations au plus près du terrain (nouvelle chronologie des médias intégrant les plateformes dans le financement des films).
 
Sur le fond, maintenant, avec la succession de six ministres de la Culture ces dix dernières années, nous avons du mal à discerner un esprit, une dynamique, un projet global. Et malheureusement, le pass Culture, présenté dès 2017 comme un outil "révolutionnaire" est loin de convaincre : un coût exorbitant (240 M€), un développement interminable (5 ans !) et surtout une logique basée sur l’outil numérique (application + algorithmes) qui, in fine, ne fait que renforcer les pratiques consuméristes déjà existantes et les tendances mainstream (entre les ventes mirifiques de mangas et les entrées des blockbusters millionnaires). Heureusement, l’élargissement du pass aux collégiens avec une enveloppe gérée par les établissements ainsi que la création du fonds Jeunes cinéphiles permettent d’envisager une version plus éducative et culturelle.
 
Notre proposition aux différents candidats dans le domaine de la culture, est d’impulser un dessein général concentré sur la nécessité du lien culturel. Dans la première moitié du XXe siècle, le public partageait la découverte d’une œuvre dans une grande salle. Dans la seconde moitié du siècle dernier, il partageait le plus souvent cette découverte au sein du foyer. Maintenant, c’est chacun devant son (ou ses) écran(s). L’individualisation commerciale du rapport à la culture est en marche. Chacun son écran, chacun son film. C’est le principe même du partage et de la transmission qui est abîmé. Ce dessein général que nous proposons est de donner la priorité absolue à la transmission, à l’éducation artistique et culturelle. Nous avons un maillage formidable de cinémas sur l’ensemble du territoire. Nous avons besoin d’un maillage très fin d’enseignants référents dans chaque établissement, d’éducateurs, d’animateurs, de responsables de lieux culturels formés, bien rémunérés, missionnés dans la durée pour éveiller, apprendre, faire découvrir le cinéma et les autres arts. Ce n’est pas une dépense de plus. C’est un des investissements les plus prometteurs pour l’épanouissement et la vie en commun pour les décennies à venir.

Florian Krieg
© crédit photo : Isabelle Nègre


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