Congrès FNCF 2024 - Victor Hadida (FNEF) : "Valoriser la prise de risque inhérente au métier d’éditeur de films"
Date de publication : 26/09/2024 - 07:50
Alors que s’ouvre ce jeudi 26 septembre la Journée des Editeurs de films, que sa fédération coorganise, retour avec le président de la FNEF sur les enjeux de ce rendez-vous, mais également sa perception du marché, les perspectives et les attentes du secteur.
Alors que s'ouvre la Journée des Éditeurs de films, que vous coorganisez dans le cadre du Congrès de la FNCF, pouvez-vous rappeler les enjeux de cet élément pour les distributeurs ?
C’est un moment de l’année qui permet à tous – exploitants, éditeurs, auteurs, talents et producteurs - de se rencontrer, et l’on ne dira jamais assez combien c’est essentiel à notre profession. Mais cette journée, c’est aussi l’occasion d’avoir une vision à 360 degrés du marché, de découvrir la quasi-entièreté de l’offre de films à venir. Avec toute la diversité des cinématographies que nous avons la chance d’accueillir en France. Au fil du temps, les éditeurs sont de plus en plus nombreux à vouloir y participer. Avec 32 sociétés présentes cette année, le succès ne se dément pas. Cela va certainement nous amener à réfléchir pour faire évoluer le format, à l’avenir, afin que cette journée reste dynamique, fluide et attractive.
Comment jugez-vous la fréquentation des salles depuis le début de l'année ?
Elle a été, comme toujours, très liée à l’offre de films. En début d’année, le manque d’offre américaine (liée à la grève) s’est ressenti, quand bien même quelques titres ont pu dynamiser les salles ponctuellement. L’été a en revanche été très satisfaisant, avec le retour progressif des films US et une offre de films français qui a su séduire le public. Il n’était pas évident de se projeter dans le contexte de l’Euro de football et des Jeux olympiques mais plusieurs éditeurs-distributeurs ont fait le pari de sortir leurs films à cette période. C’était une réelle prise de risque qu’il faut saluer, et qui a eu pour effet de dynamiser le marché au bénéfice de tous.
Au total, cette fréquentation est une bonne nouvelle pour l'ensemble des salles françaises. Le constat est plus en demi-teinte pour les éditeurs-distributeurs car la polarisation de la fréquentation se confirme. Certains titres marchent très bien, mais beaucoup d’autres, de toutes sortes - films de marché comme films d’auteur, se retrouvent dans des situations compliquées où ils n’arrivent pas à réaliser leurs objectifs. Il y a eu des d'échecs depuis le début de l'année, et beaucoup plus cuisants qu’auparavant. Des films d’auteur ou fragiles pour lesquels on pouvait espérer entre 80 000 et 100 000 entrées ou plus terminent leur carrière à 50 000 voire encore moins. Et les sorties calibrées pour 50 000 font désormais moins de 20 000...
Quelle sera la teneur de l'offre dans les mois qui viennent ?
L‘offre s’annonce robuste et enthousiasmante. La fin d'année 2024 va être marquée par de belles propositions, avec des films importants voire majeurs, français comme blockbusters étrangers. Monsieur Aznavour, L’amour ouf, Saint, Exupéry, Joker : Folie à deux, Gladiator 2 ou Mufasa: Le roi lion… vont arriver sur les écrans ainsi que de nombreux films d’auteurs reconnus à Cannes ou dans d’autres festivals. En 2025, l'offre américaine reviendra à un volume plus soutenu, avec des franchises et des œuvres d’auteurs visant aussi bien les cinéphiles que le grand public. Cette diversité de l'offre est primordiale : c’est une nécessité de marché en même temps qu’une ambition culturelle.
Après l'annonce de la reconduction de Rachida Dati au Ministère de la Culture, quelles sont vos attentes vis-à-vis des pouvoirs publics ?
La reconduction de Rachida Dati à ce portefeuille est une bonne nouvelle pour notre filière, qui pourra bénéficier de son expérience politique, toujours importante pour gagner des arbitrages difficiles. C’est aussi une ministre qui a comme priorité la diffusion de la culture au plus grand nombre, sur tous les territoires. Et c’est un domaine dans lequel nous avons un grand rôle à jouer en tant qu’éditeurs-distributeurs de films, et nous avons matière à aller plus loin.
Je note aussi que la ministre a redit hier son engagement résolu à conforter un CNC fort et autonome, c’est pour nous un élément de stabilité important car nous sommes très attentifs à tout ce qui concerne l’économie et les prérogatives du CNC. Il est notamment primordial que le Centre reste à la manœuvre quant à la collecte et au recouvrement des taxes affectées, sans plafonnement. Le dispositif actuel de la TSA est l’un des piliers du modèle français. Le remettre en cause, ce serait déstabiliser tout un écosystème et tout une politique industrielle.
Qu'attendez-vous du futur de la présidence du CNC pour votre secteur ?
Une demande prioritaire pour nous est le déplafonnement du fonds de soutien automatique des distributeurs. Il y a une injustice à être le seul secteur de la filière dont le soutien automatique est plafonné. C’est d’autant plus paradoxal que nous n’avons jamais eu autant besoin d’encourager et de valoriser nos succès afin de compenser nos échecs. Rappelons qu’en cas de succès, nous sommes rémunérés à la commission, mais en cas d’échec, nous perdons l’ensemble du capital investi. Il faut valoriser la prise de risque inhérente au métier d’éditeur : pour ne citer qu’un exemple, comment se serait déroulé l’été 2024 sans la décision de Pathé Films de sortir Le comte de Monte Cristo fin juin, plutôt qu’en décembre, boostant la Fête du Cinéma et toute la saison par la suite ?
Nous souhaitons également travailler avec tous nos partenaires, au-delà des bordereaux a la séance, sur la généralisation des outils d’analyse de la data et plus globalement de la remontée d’information instantanée notamment des entrées, en volume et en valeur, ce qui nous permettrait d’optimiser avec les exploitants, l’exposition du film, et d’être réactif pour le soutenir en marketing digital. Tout le monde serait gagnant. Des outils existent, mais il reste à les mettre en place largement.
Enfin, un sujet d’actualité est le réajustement de la procédure du visa exceptionnel : sans remettre en cause l’existence de ce visa, ni les critères actuels, des améliorations doivent être apportées en termes de sanctions et de compatibilité avec le marché du cinéma. Je pense par exemple à l’introduction d’un délai de prévenance qui permettrait aux distributeurs de repositionner éventuellement leurs sorties. Nous porterons plusieurs demandes d’amélioration lors de la concertation annoncée à brève échéance par le CNC.
C’est un moment de l’année qui permet à tous – exploitants, éditeurs, auteurs, talents et producteurs - de se rencontrer, et l’on ne dira jamais assez combien c’est essentiel à notre profession. Mais cette journée, c’est aussi l’occasion d’avoir une vision à 360 degrés du marché, de découvrir la quasi-entièreté de l’offre de films à venir. Avec toute la diversité des cinématographies que nous avons la chance d’accueillir en France. Au fil du temps, les éditeurs sont de plus en plus nombreux à vouloir y participer. Avec 32 sociétés présentes cette année, le succès ne se dément pas. Cela va certainement nous amener à réfléchir pour faire évoluer le format, à l’avenir, afin que cette journée reste dynamique, fluide et attractive.
Comment jugez-vous la fréquentation des salles depuis le début de l'année ?
Elle a été, comme toujours, très liée à l’offre de films. En début d’année, le manque d’offre américaine (liée à la grève) s’est ressenti, quand bien même quelques titres ont pu dynamiser les salles ponctuellement. L’été a en revanche été très satisfaisant, avec le retour progressif des films US et une offre de films français qui a su séduire le public. Il n’était pas évident de se projeter dans le contexte de l’Euro de football et des Jeux olympiques mais plusieurs éditeurs-distributeurs ont fait le pari de sortir leurs films à cette période. C’était une réelle prise de risque qu’il faut saluer, et qui a eu pour effet de dynamiser le marché au bénéfice de tous.
Au total, cette fréquentation est une bonne nouvelle pour l'ensemble des salles françaises. Le constat est plus en demi-teinte pour les éditeurs-distributeurs car la polarisation de la fréquentation se confirme. Certains titres marchent très bien, mais beaucoup d’autres, de toutes sortes - films de marché comme films d’auteur, se retrouvent dans des situations compliquées où ils n’arrivent pas à réaliser leurs objectifs. Il y a eu des d'échecs depuis le début de l'année, et beaucoup plus cuisants qu’auparavant. Des films d’auteur ou fragiles pour lesquels on pouvait espérer entre 80 000 et 100 000 entrées ou plus terminent leur carrière à 50 000 voire encore moins. Et les sorties calibrées pour 50 000 font désormais moins de 20 000...
Quelle sera la teneur de l'offre dans les mois qui viennent ?
L‘offre s’annonce robuste et enthousiasmante. La fin d'année 2024 va être marquée par de belles propositions, avec des films importants voire majeurs, français comme blockbusters étrangers. Monsieur Aznavour, L’amour ouf, Saint, Exupéry, Joker : Folie à deux, Gladiator 2 ou Mufasa: Le roi lion… vont arriver sur les écrans ainsi que de nombreux films d’auteurs reconnus à Cannes ou dans d’autres festivals. En 2025, l'offre américaine reviendra à un volume plus soutenu, avec des franchises et des œuvres d’auteurs visant aussi bien les cinéphiles que le grand public. Cette diversité de l'offre est primordiale : c’est une nécessité de marché en même temps qu’une ambition culturelle.
Après l'annonce de la reconduction de Rachida Dati au Ministère de la Culture, quelles sont vos attentes vis-à-vis des pouvoirs publics ?
La reconduction de Rachida Dati à ce portefeuille est une bonne nouvelle pour notre filière, qui pourra bénéficier de son expérience politique, toujours importante pour gagner des arbitrages difficiles. C’est aussi une ministre qui a comme priorité la diffusion de la culture au plus grand nombre, sur tous les territoires. Et c’est un domaine dans lequel nous avons un grand rôle à jouer en tant qu’éditeurs-distributeurs de films, et nous avons matière à aller plus loin.
Je note aussi que la ministre a redit hier son engagement résolu à conforter un CNC fort et autonome, c’est pour nous un élément de stabilité important car nous sommes très attentifs à tout ce qui concerne l’économie et les prérogatives du CNC. Il est notamment primordial que le Centre reste à la manœuvre quant à la collecte et au recouvrement des taxes affectées, sans plafonnement. Le dispositif actuel de la TSA est l’un des piliers du modèle français. Le remettre en cause, ce serait déstabiliser tout un écosystème et tout une politique industrielle.
Qu'attendez-vous du futur de la présidence du CNC pour votre secteur ?
Une demande prioritaire pour nous est le déplafonnement du fonds de soutien automatique des distributeurs. Il y a une injustice à être le seul secteur de la filière dont le soutien automatique est plafonné. C’est d’autant plus paradoxal que nous n’avons jamais eu autant besoin d’encourager et de valoriser nos succès afin de compenser nos échecs. Rappelons qu’en cas de succès, nous sommes rémunérés à la commission, mais en cas d’échec, nous perdons l’ensemble du capital investi. Il faut valoriser la prise de risque inhérente au métier d’éditeur : pour ne citer qu’un exemple, comment se serait déroulé l’été 2024 sans la décision de Pathé Films de sortir Le comte de Monte Cristo fin juin, plutôt qu’en décembre, boostant la Fête du Cinéma et toute la saison par la suite ?
Nous souhaitons également travailler avec tous nos partenaires, au-delà des bordereaux a la séance, sur la généralisation des outils d’analyse de la data et plus globalement de la remontée d’information instantanée notamment des entrées, en volume et en valeur, ce qui nous permettrait d’optimiser avec les exploitants, l’exposition du film, et d’être réactif pour le soutenir en marketing digital. Tout le monde serait gagnant. Des outils existent, mais il reste à les mettre en place largement.
Enfin, un sujet d’actualité est le réajustement de la procédure du visa exceptionnel : sans remettre en cause l’existence de ce visa, ni les critères actuels, des améliorations doivent être apportées en termes de sanctions et de compatibilité avec le marché du cinéma. Je pense par exemple à l’introduction d’un délai de prévenance qui permettrait aux distributeurs de repositionner éventuellement leurs sorties. Nous porterons plusieurs demandes d’amélioration lors de la concertation annoncée à brève échéance par le CNC.
Propos recueillis par Sylvain Devarieux
© crédit photo : Julien Lienard pour LFF
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