Lumière MIFC 2024 - L’exploitation au rendez-vous du cinéma de répertoire
Date de publication : 17/10/2024 - 08:10
Le Marché international du Film classique hébergeait, pour son deuxième jour, une table-ronde dressant l’état des lieux de l’exposition du cinéma classique dans l’exploitation, française comme européenne.
Organisée dans le cadre du parcours exploitant du 12e MIFC à Lyon Lumière, cet échange modéré par Julien Marcel, fondateur et dirigeant de The Boxoffice Company, accueillait tous les grandes représentants institutionnels de la diffusion en salle, ce mercredi 16 octobre au matin : Guillaume Baschy, président de l’Afcae, Christian Bräuer, président de la Cicae, Laura Houlgatte, CEO de l’Unic, Nadège Lauzzana, présidente de l’ADRC, et Richard Patry, président de la FNCF. Tous réuni pour échanger et débattre autour de la thématique : La salle, écrin du patrimoine : stratégies et leviers pour une exposition accrue. Mais en-dehors du caractère prospectif que laissait promettre cet intitulé, c’est surtout un état des lieux de la diffusion du cinéma classique en salle qui a été ainsi servi aux accrédités, une fois encore venus en nombre pour faire salle comble.
En effet, l’échange a tout d’abord débuté par un énième débat sur la définition même du cinéma de patrimoine. L’occasion de rappeler, à qui l’ignorait encore, qu’aucune interprétation de l’appellation ne fait consensus – 20 ans après la sortie originelle pour le CNC en France, 10 ans pour l’Observatoire européens de l’Audiovisuel (OEA), et de 1 à 25 ans pour les différents pays du continent et leurs institutions. Une appellation qui demeure donc subjective.
Le point en chiffres
L’échange a en outre mis en lumière la mission et l’action de l’Agence pour le développement régional du cinéma, dont sa présidente, Nadège Lauzzana, a ainsi rappelé les chiffres : plus de 1 500 titres recensés en ressources, +11% d’accompagnement entre 2022 et 2023 sur le cinéma classique, couvrant plus de 35% du territoire français. Ce à quoi s’ajoutent également les bons bilans de Play it Again ! et des Mycéliades – ce dernier étant renouvelé pour une 3e édition, toujours en association avec Images en Bibliothèques. "Le rôle de l’ADRC est d’accompagner les salles afin de faciliter les animations et d’y contribuer financièrement, mais aussi d’éditorialiser, via ces festivals et rendez-vous à l’échelle du territoire", a précisé la présidente de l’agence.
La table-ronde fut aussi l’occasion d’évoquer quelques chiffres représentatifs du cinéma classique en 2023, qu’il s’agisse de son niveau record de fréquentation en France recensé par le CNC ou des proportions moins fortes mais elles aussi en progression relevées par l’OEA. Ce dernier, focalisé sur les rééditions de films à plus de 10 après la sortie, relève que ces films représentent 1,6% de la fréquentation globale sur son périmètre en 2023, là où elle n’était que de 0,9% avant la pandémie, en 2019. La présidente de l’Unic a toutefois identifié plusieurs challenges vis-à-vis de la diffusion du cinéma classique sur le continent européen, dont l’identification claire des ayants-droits, la qualité des copies, la disponibilités des doublages et sous-titres et, surtout, le coût des taux de location, "très élevés" chez de nombreux distributeurs ou ayants-droits.
"Le patrimoine fonctionne au cinéma, les spectateurs ont envie aujourd’hui de découvrir les films classiques dans l’écrin de la salle", a ainsi commenté Richard Patry concernant le seul périmètre français. "Il faut s’en réjouir, s’y ouvrir et s’y intéresser". Et le président de la fédération des exploitants hexagonaux d’expliquer cette nette progression de fréquentation par rapport aux précédentes décennies par les effets conjugués de la numérisation des salles comme des films, facilitant donc l’accès à l’œuvre comme sa distribution, mais aussi les différents évènements anniversaires des principaux studios, français comme américains, dont l’actualité a été déclinée en salle par une offre et un travail des catalogues renforcés.
La baisse de volume des productions américaines depuis la crise sanitaire a également été soulignée comme participant au phénomène par Laura Houlgatte, qui a relevé une offre US "en baisse de 30%" dans les salles du continent. La dirigeante de l’Unic a en outre souligné le travail renforcé des cinémas européens autour des réédition de films, témoignant d’ailleurs d’une ouverture en programmation opérée chez plusieurs grands circuits aux Pays-bas, en Italie ou au Royaume Uni.
Alerte sur l’éducation au cinéma
Pour autant, Guillaume Baschy a tenu à relativiser l’excellent score du cinéma de répertoire en salle, pointant que sur les 4,4 millions d’entrées réalisées par ce segment d’offre l’an dernier en France, "plus de 1 million" étaient issues des différents dispositifs scolaires mis en place sur le territoire. Soit "tout un travail de découverte mené auprès des jeunes générations" actuellement "en danger" selon l’exploitant, rappelant l’alerte lancée par tout le secteur sur les conséquences des récents décrets gouvernementaux sur le temps de formation des enseignants. "Demain, ce résultat sera peut-être bien inférieur à 4,4 millions" a-t-il signalé.
Le président de l’Afcae a en outre alerté sur l’espace de programmation consacré aux œuvres classiques dans les salles françaises, appelant là à une prise de responsabilité de la part des distributeurs des sorties en premières exclusivité : "quand on exige plus d’une vingtaine de séances sur un film de première exclusivité, cela ne laisse que peu de séances pour les œuvres de la diversité et donc pour le cinéma de répertoire", a-t-il constaté, soulignant qu’un dialogue doit être ouvert avec le secteur de la distribution. "Il faut laisser de la place dans nos salles au cinéma de patrimoine, parce que le public est en demande", a appuyé Richard Patry.
"La représentation du cinéma de patrimoine est assez hétérogène dans les salles et leurs pratiques de programmation, a témoigné Nadège Lauzzana. Tout le monde est sous une certaine pression liée aux nombres de séances, mais cela renvoie à des choix de politique culturelle, qu’il faudrait affirmer en écoutant les envies du public. Nous sortons d’une logique de niche pour une diffusion plus récurrente, portée par une programmation plus éditorialisée."
En effet, l’échange a tout d’abord débuté par un énième débat sur la définition même du cinéma de patrimoine. L’occasion de rappeler, à qui l’ignorait encore, qu’aucune interprétation de l’appellation ne fait consensus – 20 ans après la sortie originelle pour le CNC en France, 10 ans pour l’Observatoire européens de l’Audiovisuel (OEA), et de 1 à 25 ans pour les différents pays du continent et leurs institutions. Une appellation qui demeure donc subjective.
Le point en chiffres
L’échange a en outre mis en lumière la mission et l’action de l’Agence pour le développement régional du cinéma, dont sa présidente, Nadège Lauzzana, a ainsi rappelé les chiffres : plus de 1 500 titres recensés en ressources, +11% d’accompagnement entre 2022 et 2023 sur le cinéma classique, couvrant plus de 35% du territoire français. Ce à quoi s’ajoutent également les bons bilans de Play it Again ! et des Mycéliades – ce dernier étant renouvelé pour une 3e édition, toujours en association avec Images en Bibliothèques. "Le rôle de l’ADRC est d’accompagner les salles afin de faciliter les animations et d’y contribuer financièrement, mais aussi d’éditorialiser, via ces festivals et rendez-vous à l’échelle du territoire", a précisé la présidente de l’agence.
La table-ronde fut aussi l’occasion d’évoquer quelques chiffres représentatifs du cinéma classique en 2023, qu’il s’agisse de son niveau record de fréquentation en France recensé par le CNC ou des proportions moins fortes mais elles aussi en progression relevées par l’OEA. Ce dernier, focalisé sur les rééditions de films à plus de 10 après la sortie, relève que ces films représentent 1,6% de la fréquentation globale sur son périmètre en 2023, là où elle n’était que de 0,9% avant la pandémie, en 2019. La présidente de l’Unic a toutefois identifié plusieurs challenges vis-à-vis de la diffusion du cinéma classique sur le continent européen, dont l’identification claire des ayants-droits, la qualité des copies, la disponibilités des doublages et sous-titres et, surtout, le coût des taux de location, "très élevés" chez de nombreux distributeurs ou ayants-droits.
"Le patrimoine fonctionne au cinéma, les spectateurs ont envie aujourd’hui de découvrir les films classiques dans l’écrin de la salle", a ainsi commenté Richard Patry concernant le seul périmètre français. "Il faut s’en réjouir, s’y ouvrir et s’y intéresser". Et le président de la fédération des exploitants hexagonaux d’expliquer cette nette progression de fréquentation par rapport aux précédentes décennies par les effets conjugués de la numérisation des salles comme des films, facilitant donc l’accès à l’œuvre comme sa distribution, mais aussi les différents évènements anniversaires des principaux studios, français comme américains, dont l’actualité a été déclinée en salle par une offre et un travail des catalogues renforcés.
La baisse de volume des productions américaines depuis la crise sanitaire a également été soulignée comme participant au phénomène par Laura Houlgatte, qui a relevé une offre US "en baisse de 30%" dans les salles du continent. La dirigeante de l’Unic a en outre souligné le travail renforcé des cinémas européens autour des réédition de films, témoignant d’ailleurs d’une ouverture en programmation opérée chez plusieurs grands circuits aux Pays-bas, en Italie ou au Royaume Uni.
Alerte sur l’éducation au cinéma
Pour autant, Guillaume Baschy a tenu à relativiser l’excellent score du cinéma de répertoire en salle, pointant que sur les 4,4 millions d’entrées réalisées par ce segment d’offre l’an dernier en France, "plus de 1 million" étaient issues des différents dispositifs scolaires mis en place sur le territoire. Soit "tout un travail de découverte mené auprès des jeunes générations" actuellement "en danger" selon l’exploitant, rappelant l’alerte lancée par tout le secteur sur les conséquences des récents décrets gouvernementaux sur le temps de formation des enseignants. "Demain, ce résultat sera peut-être bien inférieur à 4,4 millions" a-t-il signalé.
Le président de l’Afcae a en outre alerté sur l’espace de programmation consacré aux œuvres classiques dans les salles françaises, appelant là à une prise de responsabilité de la part des distributeurs des sorties en premières exclusivité : "quand on exige plus d’une vingtaine de séances sur un film de première exclusivité, cela ne laisse que peu de séances pour les œuvres de la diversité et donc pour le cinéma de répertoire", a-t-il constaté, soulignant qu’un dialogue doit être ouvert avec le secteur de la distribution. "Il faut laisser de la place dans nos salles au cinéma de patrimoine, parce que le public est en demande", a appuyé Richard Patry.
"La représentation du cinéma de patrimoine est assez hétérogène dans les salles et leurs pratiques de programmation, a témoigné Nadège Lauzzana. Tout le monde est sous une certaine pression liée aux nombres de séances, mais cela renvoie à des choix de politique culturelle, qu’il faudrait affirmer en écoutant les envies du public. Nous sortons d’une logique de niche pour une diffusion plus récurrente, portée par une programmation plus éditorialisée."
Réforme art et essai
Un autre point a été fait sur le possible impact de la réforme art et essai en France sur la diffusion du cinéma de patrimoine dans les salles classées. "Cette réforme apporte du plus, et peut-être un peu de moins", a jugé Guillaume Baschy. Celui-ci a envisagé que la démonétisation des labels au sein du soutien automatique allait peut-être produire un effet sur la programmation de films classiques en salle. Mais cet effet serait potentiellement rattrapé par les bénéfices d’une programmation, "dès la première séances" – et non plus selon des quotas - dans les commissions sélectives, qui prennent aussi en compte l’action globale du cinéma en faveur du patrimoine cinématographique, entrainant donc une valorisation du soutien sélectif.
La table-ronde s’est terminée sur une ouverture du débat au public d’accrédités dans la salle, où a été notamment rappelé le rôle primordial des distributeurs des films dans leur lien entre les diffuseurs – dont la salle – et les ayants-droits. "Il faut de l'oxygène pour le patrimoine, c'est difficile, il y a des combats à mener tous ensemble", a ainsi exprimé Marc Olry, distributeur de Lost Films et vice-président en charge du patrimoine au sein du Syndicat des distributeurs indépendants. "Plusieurs associations régionales proposaient du cinéma classique dans leurs prévisionnements et ne le font plus. C'est là notre réalité. Bien ce n'est pas assez. Il reste encore beaucoup de choses à faire ensemble."
Un autre point a été fait sur le possible impact de la réforme art et essai en France sur la diffusion du cinéma de patrimoine dans les salles classées. "Cette réforme apporte du plus, et peut-être un peu de moins", a jugé Guillaume Baschy. Celui-ci a envisagé que la démonétisation des labels au sein du soutien automatique allait peut-être produire un effet sur la programmation de films classiques en salle. Mais cet effet serait potentiellement rattrapé par les bénéfices d’une programmation, "dès la première séances" – et non plus selon des quotas - dans les commissions sélectives, qui prennent aussi en compte l’action globale du cinéma en faveur du patrimoine cinématographique, entrainant donc une valorisation du soutien sélectif.
La table-ronde s’est terminée sur une ouverture du débat au public d’accrédités dans la salle, où a été notamment rappelé le rôle primordial des distributeurs des films dans leur lien entre les diffuseurs – dont la salle – et les ayants-droits. "Il faut de l'oxygène pour le patrimoine, c'est difficile, il y a des combats à mener tous ensemble", a ainsi exprimé Marc Olry, distributeur de Lost Films et vice-président en charge du patrimoine au sein du Syndicat des distributeurs indépendants. "Plusieurs associations régionales proposaient du cinéma classique dans leurs prévisionnements et ne le font plus. C'est là notre réalité. Bien ce n'est pas assez. Il reste encore beaucoup de choses à faire ensemble."
Sylvain Devarieux
© crédit photo : DR
L’accès à cet article est réservé aux abonnés.
Vous avez déjà un compte
Accès 24 heures
Pour lire cet article et accéder à tous les contenus du site durant 24 heures
cliquez ici