Isabelle Huppert en pleine lumière
Date de publication : 19/10/2024 - 07:30
La cérémonie organisée ce vendredi 18 octobre fut l’occasion d’honorer l’actrice française, nouvelle récipiendaire du Prix Lumière, au sein d’une soirée ponctuée de musique et de surprises.
"Ce festival est construit autour de l'idée que l’on pouvait tous se retrouver, se rassembler devant des films dits du passé. Mais ils ne sont pas du passé. Comme Giuseppe Tornatore l’a dit : ‘finalement, ceux qui voient mes films aujourd'hui en font des films d’aujourd'hui’. Le cinéma est là et parmi nous, il est moderne. Dans la ville natale du cinéma, là où la vue sur l'Histoire, depuis la rue du Premier film, est absolument imprenable, c'est bien là qu'il fallait faire un festival d'histoire du cinéma." C’est ainsi que Thierry Frémaux, directeur du Festival Lumière, a ouvert la 15e cérémonie du Prix Lumière, ce vendredi 18 octobre au Grand Amphithéâtre de Lyon.
"Je rappelle que le cinéma français n'est pas subventionné. Le cinéma français vit du cinéma français. Chaque fois que vous allez au cinéma, une petite part sur le prix du billet est réintégrée dans le travail collectif, permettant à la France toujours de tenir son rang… et plus que ça, puisque c'est en France que le cinéma se porte le mieux !", a-t-il ajouté.
Une cérémonie taillée sur-mesure pour honorer en bonne et due forme la nouvelle récipiendaire dudit prix, l’actrice française Isabelle Huppert, qui succède donc ainsi à Wim Wenders sur les projecteurs de Lumière. "C'est une immense émotion pour moi d'être là ce soir", a donc déclaré en préambule l’intéressée. "Comme dit Irène Jacob, c'est notre façon d'aimer, d'aimer le cinéma, d'aimer la ville de Lyon. Merci infiniment à la ville de Lyon. Merci à la lumière. Merci à toutes et à tous."
L'évènement hébergea, comme de coutume, un véritable défilé de stars et de personnalités cinématographiques ou artistiques. Dans les rangs de l’Amphithéâtre, pouvaient ainsi être aperçus ce soir-là Alexandre Aja, Emmanuelle Béart, Guillaume Gallienne, Ludivine Sagnier, Anthony Delon, Rithy Panh, Alfonso Cuaron, Sandrine Kiberlain, Regis Wargnier, Julie Gayet, Vincent Perez, Lucien Jean-Baptiste, Irène Jacob, Coralie Fargeat, Alejandro Jodorowsky, Claire Denis, Fernando Meirelles, François Ozon, Laurent Gerra, Noémie Merlant, Abd al Malik, Julien Clerc, James Franco, Camelia Jordana, Sandrine Bauer, ainsi que les proches d’Isabelle Huppert, son mari Ronald Chammah et ses fils Lorenzo et Angelo Chammah.
Au rang institutionnel, étaient notamment présents Patrick Raude, secrétaire général de la SACD, Iris Knobloch, présidente du Festival de Cannes – accompagnée d’ailleurs des jeunes talents de la Résidence du Festival de Cannes -, Olivier Henrard, président du CNC, Victor Hadida, président de la FNEF. Côté professionnels, on pouvait relever la présence d’Anne Flamant (Neuflize OBC), Thierry Lacaze et Anna Marsh (Studiocanal), Régine Vial (Les Films du Losange), Vincent Paul-Boncourt (Carlotta Films), Lionel Ithurralde et Anne-Laure Brénéol (Malavida Films), André Labouze (Gaumont), entre autres, ainsi que les ayants-droits Max Lefrancq-Lumière et Carmen Chaplin.
C’est sur les notes d’un tube de la fin des années 1980, Nuits de folie par le groupe Début de soirée – véritable fil rouge de cet hommage lyonnais -, qu’Isabelle Huppert a dont été présentée au public, nombreux, ponctuant ainsi une 15e édition du Festival Lumière qui aura ainsi projeté 159 films, en 415 séances, durant toute une semaine.
La préférence
La musique, semble-t-il très présente dans l’univers de l’honorée du jour, ponctua donc régulièrement cette cérémonie. Ainsi, Camélia Jordana a interprété une reprise toute personnelle d’I Will Survive de Gloria Gaynor. Sandrine Kiberlain s’est également illustrée à son tour sur Nuits de folie, en changeant légèrement les paroles afin d’y glisser le nom d’Isabelle Huppert. Enfin, Julien Clerc s’est présenté au piano pour reprendre l’un de ses morceaux phares, Ma préférence, ici dédié à Isabelle Huppert.
La musique, semble-t-il très présente dans l’univers de l’honorée du jour, ponctua donc régulièrement cette cérémonie. Ainsi, Camélia Jordana a interprété une reprise toute personnelle d’I Will Survive de Gloria Gaynor. Sandrine Kiberlain s’est également illustrée à son tour sur Nuits de folie, en changeant légèrement les paroles afin d’y glisser le nom d’Isabelle Huppert. Enfin, Julien Clerc s’est présenté au piano pour reprendre l’un de ses morceaux phares, Ma préférence, ici dédié à Isabelle Huppert.
Au-delà de la musique, l’hommage était évidemment fait d’images. Plusieurs boucles ont ainsi marqué l’évènement, témoignant de l’édition en cours, résumant les 15 précédentes ou encore retraçant la filmographie d’Isabelle Huppert à l’occasion d’un montage très rythmé. Sans oublier un extrait des Lumières de la ville, de et avec Charlie Chaplin, en présence donc de sa petite-fille Carmen Chaplin.
Mais aussi, un hommage à Michael Cimino, avec des extraits de sa présentation de la version restaurée de La porte du paradis en 2012 à Lyon, un grand moment de la 4e édition du festival. " Je suis très heureux de partager la scène avec mon amour Isabelle Huppert", avait alors déclaré le regretté cinéaste américain. "Quand nous travaillions ensemble, nous étions des enfants du paradis, mais nous ne le savions pas." "Ces images sont très bouleversantes pour moi, et me rappellent évidemment la joie de Michael, mais aussi sa souffrance quand le film est sorti", a réagi l’actrice après la projection du petit montage. "Et c'est pour cela que, présenter le film ici à Lyon, a formé une réconciliation avec ce film, et avec lui-même. Merci Thierry de l'avoir convié." En outre, un temps d’hommage a été réservé au journaliste et critique Aurélien Ferenczi, disparu cette semaine.
Le "mystère" Huppert
Les mots, enfin, ont en effet été nombreux. Ceux du réalisateur mexicain Alfonso Cuarón, tout d’abord, venu à Lumière présenter sa nouvelle série Disclaimer (Apple TV+), qui a tenu à rester pour honorer Isabelle Huppert et le cinéma français, dans un discours touchant traduit en direct en français par Noémie Merlant. "Je suis très ému d'être ici, dans ce temple, à célébrer Isabelle Huppert", a ainsi déclaré le réalisateur. "Je tiens à exprimer mon amour profond pour votre cinéma et mon immense gratitude envers lui. Si je ne parlais pas sa langue, le cinéma français ne m'a jamais donné l'impression d'être un étranger. Il m'a accueilli dans toute sa générosité, m'a donné la sensation d'être chez moi."
"Il y avait toujours, même dans les comédies les plus drôles, une part de mystère. L'un de ces mystères qu'il est impossible de saisir pleinement. Et l'une des plus grandes instigatrices de ce mystère s'appelle Isabelle Huppert", a souligné Alfonso Cuarón. "Isabelle, c'est une voix contre l'angoisse sourde qui est la nôtre dans les espaces encombrés de la vie publique ; contre la crainte silencieuse de la solitude et contre l'insignifiance à vivre dans un monde apparemment imperméable à notre existence. Elle nous englobe dans une chaude couverture, celle de l'intimité. Elle rappelle tous les potentiels de tendresse, d'exubérance et de joie que recèlent les êtres humains. Et elle fait ça presque discrètement, mystérieusement. Le plus grand cadeau d'Isabelle Huppert a été de défier sans relâche nos idées de vertu et d'excellence."
Advenir
Présidente de l’Institut Lumière depuis la disparition de feu Bertrand Tavernier – encore et toujours applaudi durant la cérémonie à chaque apparition sur l’écran -, Irène Jacob s’est de nouveau prêtée à l’exercice de l’éloge de la récipiendaire du jour. "Isabelle, c'est féminin, c'est pluriel. Hier, maintenant, demain. Le théâtre, le cinéma, nos cinq continents, tant de vie Isabelle. D'une chrysalide à l'autre, tu deviens, tu adviens. Tu parles souvent de ce verbe, advenir, que tu aimes. Plus qu'arriver. Parce que dans advenir, il y a une action. Tu fais venir, tu surprends, tu fais devenir plus grand, tu métamorphoses. Tu dis, dans amateur, il y a aimer. Jouer, c'est organique."
"Et c'est sans élever la voix, et simplement, que nous te remercions d'être, à travers chaque âge de la vie, cette immense actrice, sœur, muse, inspiratrice. Au nom de l'Institut et du festival, au nom de tous nos festivaliers, nous te remercions de recevoir ce prix. Isabelle, je t'aime."
Après avoir reçu le Prix Lumière 2024, des mains d’Alfonso Cuarón et Noémie Merlant, Isabelle Huppert s’est exclamée : " Mais qu'est-ce que j'ai fait pour mériter tout ça ? Je n'ai fait que des films… On m'avait dit que le Festival Lumière, que je connaissais déjà un peu, était un moment particulier, mais c'est au-delà de tout ce que j'aurais pu imaginer. Et j'ai beaucoup d'imagination."
Advenir
Présidente de l’Institut Lumière depuis la disparition de feu Bertrand Tavernier – encore et toujours applaudi durant la cérémonie à chaque apparition sur l’écran -, Irène Jacob s’est de nouveau prêtée à l’exercice de l’éloge de la récipiendaire du jour. "Isabelle, c'est féminin, c'est pluriel. Hier, maintenant, demain. Le théâtre, le cinéma, nos cinq continents, tant de vie Isabelle. D'une chrysalide à l'autre, tu deviens, tu adviens. Tu parles souvent de ce verbe, advenir, que tu aimes. Plus qu'arriver. Parce que dans advenir, il y a une action. Tu fais venir, tu surprends, tu fais devenir plus grand, tu métamorphoses. Tu dis, dans amateur, il y a aimer. Jouer, c'est organique."
"Et c'est sans élever la voix, et simplement, que nous te remercions d'être, à travers chaque âge de la vie, cette immense actrice, sœur, muse, inspiratrice. Au nom de l'Institut et du festival, au nom de tous nos festivaliers, nous te remercions de recevoir ce prix. Isabelle, je t'aime."
Après avoir reçu le Prix Lumière 2024, des mains d’Alfonso Cuarón et Noémie Merlant, Isabelle Huppert s’est exclamée : " Mais qu'est-ce que j'ai fait pour mériter tout ça ? Je n'ai fait que des films… On m'avait dit que le Festival Lumière, que je connaissais déjà un peu, était un moment particulier, mais c'est au-delà de tout ce que j'aurais pu imaginer. Et j'ai beaucoup d'imagination."
"En pleine lumière"
"Ce soir, je reçois un prix. Je ne vais pas vous le cacher, j'aime beaucoup recevoir des prix", a poursuivi l’actrice honorée. "Les prix, quand on les réfléchit, c'est un peu pour calmer les artistes turbulents. Mais aussi pour dire à celle ou à celui qui le reçoit, qu'il n'a pas travaillé pour rien. Donc, vu comme ça, vous comprenez pourquoi j'aime recevoir des prix. Parce qu’en le recevant, j'entends ce que l'on me dit : ‘Isabelle, tu as bien fait ton travail, tu n'as pas travaillé pour rien.’"
"Ce soir, je reçois un prix. Je ne vais pas vous le cacher, j'aime beaucoup recevoir des prix", a poursuivi l’actrice honorée. "Les prix, quand on les réfléchit, c'est un peu pour calmer les artistes turbulents. Mais aussi pour dire à celle ou à celui qui le reçoit, qu'il n'a pas travaillé pour rien. Donc, vu comme ça, vous comprenez pourquoi j'aime recevoir des prix. Parce qu’en le recevant, j'entends ce que l'on me dit : ‘Isabelle, tu as bien fait ton travail, tu n'as pas travaillé pour rien.’"
"Me voilà donc en pleine lumière. La lumière, ça raconte plein de choses. On dit des années-lumière, on dit à la vitesse de la lumière. La lumière, ça va vite, c'est du temps, de l'espace. Mais il n'y a pas de lumière sans ombre et il n'y a pas d'ombre sans lumière. Ce qui nous réunit tous ici, c'est cette étrange invention, cette alchimie subtile entre la lumière et l'obscurité, entre ce que l'on voit et ce que l'on devine, un jeu infini entre le visible et l'invisible, entre le réel et le rêve, entre le bruit et le silence."
"Avec le cinéma, j'ai fait le tour du monde, mais je n'ai pas fait le tour de la question. Le cinéma nous regarde. Ça aide à vivre, d'être regardé. Le cinéma, ça entretient la mémoire aussi. C'est important, la mémoire et les souvenirs. Par exemple, demain, je me réveillerai et ce moment lumineux sera un merveilleux souvenir pour toujours. Ça n'empêche pas de penser au futur. Le passé, c'est bien, mais l'avenir, c'est pas mal non plus. Le passé n'aime pas le futur. Mais ce soir, ce que j'aime par-dessus tout, c'est ici et maintenant. C'est ce moment joyeux et merveilleux, plein d'émotions, où je vous dis à tous et à toutes, du fond du cœur : merci."
Sylvain Devarieux
© crédit photo : Chassignole pour Lumière
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