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Quinzaine des réalisateurs
CANCIÓN SIN NOMBRE
AUX RACINES D’UN TRAUMATISME
Ce film sur “la tristesse et l’horreur que nous avons vécues au Pérou dans les années 1980”,
comme le présente Melina León, est né d’une histoire de trafic d’enfants racontée par son
père, le journaliste Ismael León Arias. La cinéaste en fait un scénario écrit avec Michael
J. White, processus qui s’est étalé sur plusieurs années. Désireuse de prendre son projet
en main, elle fonde sa propre société de production, La Vida Misma Films, rencontrant
ensuite ses partenaires de La Mula Producciones, producteurs de documentaires. “Nous
avons pris pas mal de risques, comme le fait d’utiliser presque tout l’argent que nous
avions trouvé pour la préproduction et le tournage, mais cela en valait la peine. Le
budget total est d’environ 650 K€.” La réalisatrice choisit ses acteurs en se fiant à son
seul instinct. “Je voulais des gens vivant dans la banlieue de Lima et qui voyaient dans
ce film la possibilité de parler de leur propre vie ou de celle de leurs parents et, surtout,
qui n’avaient pas peur du risque.” L’une des grandes difficultés a été de reconstituer le
Pérou des années 1980, certains
quartiers de Lima s’étant
depuis totalement transformés.
“Nous sommes allés tourner à
Pachacútec, dans le district de
Ventanilla, qui est une sorte de
ville nouvelle avec juste quelques
© SOPHIE DULAC DISTTIBUTION petites maisons au milieu du
sable en bord de mer. C’est un
peu terrifiant comme ambiance,
mais la beauté de l’endroit est
très spéciale.”
P. C.
Quinzaine des réalisateurs
AND THEN WE DANCED
© JOIN MOTION PICT.-SNOWGLOBE-HOB AB-FILM I VAST
Semaine de la critique
A WHITE,
WHITE DAY
© LISABI FRIDELL QUELQUE CHOSE DANS LE BLANC
L’incident déclencheur de ce deuxième long métrage de Hlynur Pálmason
se situe lors d’une excursion en montagne. “Tout à coup, les nuages sont
arrivés et tout est devenu complètement blanc. Je ne voyais plus rien,
VIVRE SA VIE tout était blanc et immobile. Je sentais qu’il y avait quelque chose de
L’idée de And Then we Danced est venue à Levan Akin, réalisateur suédois d’origine mystérieux caché dans ce blanc que je voulais explorer.” Il commence
géorgienne, en regardant l’attaque d’une gay pride à Tbilissi en 2013. “J’ai décidé de me par filmer le prologue, sans aucun financement, deux ans avant le début
rendre là-bas afin de voir si je pouvais faire un film sur la situation LGBT.” Il commence par du tournage principal. “J’ai commencé à écrire et à développer le projet
y rencontrer divers protagonistes, amassant ainsi notes et idées qui déboucheront sur un en 2013, c’est donc un processus qui a duré sept ans. Mais je travaille
scénario écrit en quelques semaines, afin de faciliter le financement du projet. Le tournage toujours en parallèle sur plusieurs projets. Cela leur donne le temps
a commencé à l’automne 2018 sans que rien ne soit encore sécurisé. “Au début, je ne savais d’émerger tout en se nourrissant les uns les autres.” Il écrit en pensant
même pas si je faisais un documentaire ou une fiction.” Levan Akin choisit de tourner dans au comédien Ingvar Eggert Sigurðsson, “grand acteur physique, très
un environnement réel, avec les personnes rencontrées lors de sa période de recherche. “Nous présent émotionnellement et formidable collaborateur. Il a accepté car
ne savions généralement pas où nous pourrions filmer le lendemain. Nous ne pouvions nous venions de finir un court métrage ensemble, The Painter”. Hlynur
dévoiler ouvertement le synopsis car si quelqu’un le découvrait, on courait le risque d’être Pálmason va de nouveau travailler avec la chef opératrice Maria von
expulsés de notre lieu de tournage. Mais ces difficultés nous ont réunis car nous avons eu la Hausswolff, dont le travail avait été très remarqué sur la photo de son
conviction que le film était encore plus important à faire à cause de l’homophobie rampante film précédent, Winter Brothers. Quant à la question de savoir ce qu’il
qui nous entourait. Au début, nous avons été assez naïfs pour demander à une femme qui attend de la sélection de A White, White Day à la Semaine de la critique,
dirigeait un ensemble de danse de soutenir notre projet. Mais elle a nous a littéralement il déclare : “Il n’y a pas de cinéma dans ma ville et la salle la plus proche
expulsés en nous disant qu’il n’y avait pas d’homosexuels dans la danse géorgienne, que ça est à 400 km. Ce n’est pas une blague. Alors je meurs d’envie d’aller
n’existait pas. Ensuite, elle a mis les autres compagnies en garde contre nous et a interdit à au cinéma et de découvrir la sélection. Et je suis un fan de la Semaine,
ses danseurs de participer. Trouver des gens pour nous aider s’est avéré très difficile. Mais d’autant que j’ai appris récemment qu’une de mes œuvres préférées,
notre producteur géorgien Ketie Danelia a fait, contre toute attente, un travail incroyable, L’esprit de la ruche de Victor Erice, y a été projetée. Je suis donc très
réussissant à convaincre plusieurs personnes de nous soutenir.” P. C. honoré de faire partie de leur compétition cette année.” P. C.
16 mai 2019