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En partenariat avec
Les déjeuners du Film français
à la Plage des Palmes
Comment expliquez-vous Aviez-vous en tête cette idée
que tant d’acteurs passent un jour de réalisation ?
à la réalisation ? Oui, mais en même temps, il y avait pas
Je pense que cette envie de réaliser peut mal de contraintes. J’ai commencé à
avoir des causes diverses, à commencer écrire et c’était très touffu. J’ai fait appel
par le fait de s’ennuyer sur un plateau et au coscénariste qui avait écrit le court de © JULIEN LIENARD POUR “LE FILM FRANÇAIS”
l’envie de s’exprimer autrement. Person- Clémence Poesy que j’avais beaucoup aimé,
nellement, j’ai suivi des études d’histoire Éric Forestier. J’ai adoré le faire mais je n’ai Hlynur Pálmason
de l’art et je me destinais à la scénogra- jamais été aussi angoissée. J’ai compris et Ingvar Eggert Sigurðsson.
phie. Jusqu’au moment où j’ai réalisé un beaucoup de choses sur le travail de metteur
décor pour Hamlet qui m’a convaincu de en scène.
renoncer à cette voie.
Votre carrière a pris un autre virage Hlynur un certain défi à relever mais mon intuition
De quelle façon avez-vous recruté à Cannes. me disait d’y aller. Ce qui compte pour moi
vos interprètes principaux ? Oui, depuis J’ai tué ma mère et Laurence Pálmason dans un projet, c’est bien sûr les dialogues,
J’ai auditionné environ 40 candidats parmi Anyways. La productrice du Rire de ma mère mais avant tout de pouvoir faire confiance
lesquels j’ai eu la chance de dénicher trois hésitait à m’engager. Après Mommy, ses réalisateur à son réalisateur. Et c’était le cas.
pépites : Lucie Digout et Jeremy Lewin, hésitations ont disparu.
qui étaient au Conservatoire, et Emma Vous avez joué aussi dans
Liégeois. Lors du casting, j’ai demandé Vous avez en fait tourné beaucoup Ingvar Eggert Les animaux fantastiques.
aux postulants de jouer une scène qui en France en peu de temps, entre Vous avez envie de continuer
ne figurait pas dans le film pour éviter cinéma et télévision ? Sigurðsson ces allers et retours entre Hollywood
de gâcher leur spontanéité par la suite. Je ne m’en rends pas compte. À 40 ans, et le cinéma islandais ?
J’attache aussi beaucoup d’importance j’ai décidé que tout irait plus vite. Cela a comédien I. E. S. : Mon expérience est essentielle-
aux lectures car je tiens à fouiller les été un accélérateur pour moi. ment islandaise puisque j’ai travaillé avec
sentiments. Quant aux rushes, je ne les Le processus d’écriture Sólveig Anspach, Baltasar Kormákur
leur ai pas montrés… mais ils ne me l’ont Vous tournez une série en Suisse ? et de réalisation de A White, ou Benedikt Erlingsson. Mais je fais de
pas demandé. Il s’agit de Bulle. Elle est écrite et réalisée White Day, sélectionné à la Semaine temps en temps des petits sauts au-dessus
par Anne Deluz, qui a travaillé avec Alain de la Critique a été très long. de l’Océan. C’est toujours intéressant de
Quelle est votre actualité ? Tanner. J’ai pour partenaire Claudia Pourquoi ? se confronter à des cultures différentes.
J’achève ces jours-ci la tournée province Cardinale qui joue ma mère, qui campe une Hlynur Pálmason : J’ai commencé à écrire Mais en fin de compte, il y a une grande
de Douce-amère, la pièce de Jean Poiret Italienne qui a émigré en Suisse. C’est une en 2013. En parallèle, je terminais mon similitude car le langage du cinéma est
mise en scène et interprétée par Michel très belle série familiale pour la RTS. court métrage de fin d’études dans lequel universel. Et je fais aussi du théâtre.
Fau. J’ai également tourné le nouveau jouait Ingvar Eggert Sigurðsson et j’en ai J’ai récemment joué à Paris aux Bouffes
film de Nicolas Vanier avec Jean-Paul Mais aussi pour Arte, profité pour lui demander s’il voudrait bien du Nord.
Rouve, Donne-moi des ailes, qui s’inspire dans Cadres noirs ? jouer dans mon long métrage. Ensuite, j’ai
de l’histoire vraie d’un homme passionné Éric Cantona y campe un homme au chô- filmé la scène d’ouverture, deux ans avant L’Islande était déjà présente
par les oies sauvages qui a réussi à mage depuis dix ans avec les souffrances le début du tournage. En fait au début, je l’an passé à la Semaine de la Critique.
les approcher pour modifier leur trajet que cela entraîne. J’y joue sa femme, travaille toujours sur plusieurs projets en Vous avez une cinématographie
migrateur. Voler parmi ces oiseaux en maman de deux filles incarnées par Alice de parallèle afin de leur laisser le temps de se très active ?
ULM était une expérience incroyable. Lencquesaing et Louise Coldefy. C’est Ziad construire. Parfois, certains se nourrissent H. P. : Je crois qu’il y a déjà eu trois films
Zoueiri qui dirige et j’adore travailler avec lui. même les uns les autres. Mais là, c’est un islandais récemment à la Semaine de la
Votre spécificité, c’est votre sourire. processus d’exploration qui a duré plus Critique, mais encore aucun en compéti-
Comment l’expliquez-vous ? Et au cinéma ? longtemps que prévu. tion dans la sélection officielle. Il est vrai
Je le tiens sans doute de mes parents Je viens de faire Death of a Ladies Man que bien que notre pays soit petit, nous
[Alain Doutey et Arielle Sémenoff]. Je pense de Matthew Bissonnette au Canada, avec C’est un personnage que vous avez avons une communauté d’une vingtaine
juste qu’on perd de l’énergie quand on fait la Gabriel Byrne. J’ai tourné à Montréal avec tout de suite eu envie de défendre ? de réalisateurs très actifs. Moi-même, j’ai
gueule et qu’il faut sourire à la vie. Antoine-Olivier Pilon (Mommy) et Karelle Ingvar Eggert Sigurðsson : Faire le court commencé par tourner des vidéos un peu
J.-P. G. Tremblay (La disparition des lucioles). métrage avec Hlynur avait été une belle expérimentales quand j’avais 13 ans. Et
F.-P. P.-L. expérience. Sur le papier, cela représentait puis peu à peu, c’est devenu des courts
métrages plus narratifs.
Suzanne Avez-vous gardé, de ce passage
Clément Mélanie Clément. par les vidéos artistiques,
Suzanne
Doutey.
une grande attention à l’image ?
Je travaille en effet avec la même chef
comédienne opératrice Maria von Hausswolff. Elle est
mon bras droit et nous collaborons depuis
mes films d’école. Je l’implique très en
Comment vous est arrivée amont et nous sommes dans un proces-
la proposition d’écrire sus d’échange permanent.
et de diriger un court métrage,
Relais, avec de jeunes acteurs Votre film A White, White Day
dans le cadre des Talents a été projeté jeudi 16 mai
Cannes Adami ? au Miramar. Comment a-t-il été
L’an dernier, quand je tournais Le jeu, accueilli ?
entre autres avec Stéphane de Groodt, Il n’est sorti que du positif. Je suis heureux
celui-ci m’avait dit à quel point il avait aimé © JULIEN LIENARD POUR “LE FILM FRANÇAIS” © JULIEN LIENARD POUR “LE FILM FRANÇAIS” d’avoir été sélectionné là-bas parce que
l’exercice. Et il avait donné mon nom au A White, White Day étant mon deuxième
producteur Gaël Cabouat. Mais j’étais en film, c’était ma dernière chance de pouvoir
plein tournage. Il est revenu à la charge y aller.
cette année, et là j’étais disponible. P. C.
21 mai 2019