Discop Africa Abidjan 2016 : Les opérateurs "araignées" face aux nouvelles législations
Les discussions pour le retour dans la légalité des câblo opérateurs pirates font l’objet d’une table ronde au cours de laquelle interviendra notamment Beatrice Damiba, présidente de l’association Convergence.
Le phénomène est purement africain mais il a pris des proportions sidérantes. La majeure partie du marché de la télévision payante du continent est sous la coupe des opérateurs dits "araignées" ou "grey market operators" en anglais. Des câblos opérateurs pirates qui se contentent de redistribuer les contenus sans payer aucun droit, ni aucune taxe. Les tarifs offerts aux abonnés peuvent ainsi défier toute concurrence. Certes le signal n’est pas toujours de bonne qualité et quelques réactions virulentes d’ayants droits obligent parfois à fermer le robinet mais les faits sont là : environs 80% des abonnés à un service de pay TV en Afrique subsaharienne francophone passe par un opérateur araignée. En octobre 2015, le groupe Canal+, par la voix de son directeur au Sénégal Sébastien Punturello, estimait que 400 000 foyers sénégalais recevaient des chaînes de télévision "pour lesquelles ils payent sans que cela ne relève du domaine légal".
Le poids des araignées est tels que les autorités ont renoncé à mettre fin à leurs activités par la force. D’autant que cette économie souterraine génère de l’emploi. 100 000 personnes en vivraient plus ou moins directement au seul Cameroun. La tactique employée passe donc par un retour au bercail des brebis galeuses. Autrement dit, inciter les câblos pirates à rentrer dans la légalité en signant des conventions de distribution officielles. Une démarche que les intéressés ont eux-mêmes initiée en créant notamment leurs propres organisations professionnelles. Mais la pilule est un peu dure à avaler pour les opérateurs locaux ayant acheté des licences d’exploitation en bonne et due forme. D’autant plus dure que certains éditeurs ont décidé parfois de traiter directement avec les araignées. Car, et c’est tout le paradoxe, les réseaux pirates sont capables de livrer parfois de précieux renseignements sur les habitudes de consommation.
Les problèmes sont multiples, à commencer par une définition du cadre juridique qui permettrait aux ex pirates de basculer dans la légalité sans pénaliser d’avantage les opérateurs légaux. Et le débat qui vient de s’ouvrir entre "pro" et "anti" légalisation des opérateurs araignées se révèle aussi passionnant qu’enflammé. Mais jusqu’ici il se déroulait dans l’ombre. La tribune que lui offre le Discop est donc une première du genre. Or le passage à la TNT amène à penser qu’il y a urgence à trouver un accord. La structuration du secteur audiovisuel africain et sa capacité à augmenter les sources de financements disponibles pour la production locale sont en jeu.
Patrice Carré
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