Tribune : Françoise Nyssen annonce vouloir renforcer la politique de soutien à l'animation "made in France"
Exclusif - À la veille de l'ouverture du 42e Festival international du film d'animation d'Annecy, et alors que les professionnels protestent contre la suppression de France 4 en linéaire, la ministre de la Culture affirme dans une tribune sa volonté de renforcer son soutien à la filière française de l'animation, à travers trois leviers : l’audiovisuel public, le cinéma et la régulation.
"À l’heure où se tient le Festival international du film d'animation d'Annecy, je veux rappeler l’ambition que l’État a pour la filière et le soutien qu’il lui apporte. La France est aujourd’hui l’un des leaders mondiaux de l’animation. En 30 ans, elle a réussi à construire une industrie enviée du monde entier, avant-gardiste, structurée, vivier d’emplois. Elle a fait émerger des personnages qui traversent les frontières, les imaginaires : de Kirikou aux Minions, aux Lapins crétins… C’est une fierté. C’est un modèle de réussite à la française.
Un modèle que nous devons à l’inventivité de nos créateurs, à la qualité de nos studios.
Un modèle qui s’appuie aussi sur une grande politique publique, lancée au début des années 1980, bâtie entièrement sur les talents, qui a permis à la création française de reconquérir une place sur ses propres écrans et de s’imposer parmi les trois premières puissances de l’animation.
Une politique de soutien que nous sommes aujourd’hui déterminés à porter plus loin.
La force du modèle français est d’accompagner l’intégralité de la filière, de l’éclosion des talents au soutien à l’international.
Ce sont d’abord des formations d’excellence : Les Gobelins, MoPA à Arles ou encore Supinfocom Rubika, à Valenciennes.
C’est le fonds de soutien à l’animation du Centre national du cinéma et de l’image animée, qui joue un rôle déterminant et qui a vu ses dotations fortement augmenter.
Ce sont les crédits d’impôt, dont la revalorisation ces deux dernières années a accompagné la relocalisation massive de la production et d’emplois sur notre territoire : je me suis battue pour qu’ils soient sanctuarisés cette année, et je continuerai de les défendre.
Ce sont les aides à l’export, qui accompagnent le succès international des studios français : la croissance phénoménale de la production française, dont les dépenses ont doublé en trois ans, est tirée pour moitié par des commandes étrangères ; les dessins animés ont notamment atteint des niveaux de vente record.
Forts de ses succès, nous allons non seulement préserver, mais faire grandir ce modèle.
Pour renforcer le soutien à l’animation "made in France", nous allons nous appuyer sur trois leviers : l’audiovisuel public, le cinéma, la régulation.
L’audiovisuel public, d’abord. J’ai mis la création au cœur de sa transformation. Nous sanctuarisons le budget qui lui est consacré. L’avenir de l’audiovisuel public repose sur sa capacité à soutenir et à diffuser une création audacieuse, exigeante, qui prend des risques. L’animation en est un pilier. France Télévisions est aujourd’hui le premier partenaire européen de la filière : elle doit le rester. Le passage de France 4 en diffusion délinéarisée s’accompagnera d’une ambition renouvelée pour l’animation. France Télévisions renforcera l’exposition de programmes d’animation sur ses autres chaînes, dans le cadre d’une politique éditoriale ambitieuse et qui donne la priorité à la création française et européenne. Et Arte développera son soutien à son financement et à sa diffusion. Nous développerons par ailleurs l’offre numérique, qui répond aux attentes et aux usages de la génération montante : la consommation de vidéo en ligne a été multipliée par près de dix en moins de quatre ans. France Télévisions possède deux plateformes consacrées à l’animation, Ludo et Zouzou, qui connaissent déjà un grand succès : elles verront leur offre renforcée. Nous allons conduire dans les prochaines semaines une concertation avec les professionnels de l’animation pour accompagner et enrichir ces évolutions.
Le cinéma, ensuite. Le renforcement du soutien à l’animation fait partie des priorités stratégiques que j’ai fixées au CNC. Le succès des films français d’animation ne doit pas faire oublier la concurrence acharnée qu’ils rencontrent. Il n’y a pas eu de politique d’envergure depuis 2005. J’ai demandé au CNC d’élaborer, en lien avec les professionnels, un nouveau plan ambitieux pour le cinéma d’animation, afin de lui apporter plus de moyens. Il couvrira la phase de développement, la phase de production et la diffusion, pour favoriser la distribution des films d’animation en France et à travers le monde.
Pour renforcer le soutien à la filière, nous devons nous appuyer sur la régulation, enfin. La France a remporté une victoire décisive, que personne n’osait espérer il y a encore quelques années, dans le cadre de la révision de la directive européenne sur les Services de médias audiovisuels (SMA), pour laquelle je me suis battue dès mon arrivée au ministère. Désormais, nous pourrons appliquer les obligations françaises en matière de financement de la création aux plateformes de vidéo à la demande qui diffusent en France mais sont établies à l'étranger. Aujourd’hui, elles échappent à notre modèle. Demain, elles devront s’acquitter des mêmes obligations que les chaînes de télévision traditionnelles. Cela se traduira concrètement par une augmentation des investissements dans la création française, et tout particulièrement dans l’animation.
Le dynamisme, la créativité et l’audace de cette filière sont une chance pour la France. Une chance pour notre culture, pour l’économie qui l’accompagne, pour les territoires qu’elle fait vivre, pour le rayonnement de notre pays. Une chance pour nos concitoyens. Je suis et je resterai aux côtés des créateurs et de tous les professionnels qui font du secteur un fer de lance de la culture française."
Françoise Nyssen, ministre de la Culture
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