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Quinzaine des réalisateurs
JOUEURS
LE CERCLE DE L’AMOUR
“Le désir du film est né il y a longtemps, lorsqu’une nuit, un peu par hasard, j’ai accompagné un ami
dans un cercle de jeu”, raconte Marie Monge. Fascinée par ce milieu, la cinéaste amasse une matière
documentaire afin de convaincre ses producteurs. “Lorsque l’écriture du scénario a débuté, en 2014,
c’était le crépuscule de ce monde, les derniers cercles fermaient leurs portes. Aujourd’hui, alors que le © MIRIADE FILMES E PRODUCOES ARTISTICAS LTDA
film est terminé, on annonce la réouverture de nouveaux établissements.” Écrit par la cinéaste avec
la collaboration de Romain Compingt, Joueurs a été produit par Michaël Gentile pour The Film, David
Pierret étant producteur associé. Pour la distribution, Marie Monge s’est entourée de Karim Leklou,
qu’elle retrouve pour la troisième fois, Tahar Rahim et Stacy Martin. “Elle me fait penser à Jean Seberg.
Une fille très belle mais trop intelligente pour s’en soucier vraiment, qui a du chien, de la répartie, de la
profondeur. Pour le personnage d’Abel, je n’ai pas eu d’acteur en tête pendant longtemps, j’étais surtout Quinzaine des réalisateurs
inspirée par des gens que je connaissais. Tahar s’est absolument emparé du rôle. Il lui a offert son
charme, son énergie, sa générosité.” Le tournage a duré huit semaines, de fin octobre à Noël, principa- LOS SILENCIOS
lement à Paris, dans le quartier de Strasbourg-Saint-Denis et des Grands Boulevards. “J’avais envie de
filmer la rue, dans mon quartier, de capter le Paris que j’aime et que je connais. Je suis excitée à l’idée
de plonger la fiction, le romanesque, dans un territoire brut, quasi-documentaire. Par ailleurs, les cercles
ayant fermés, il fallait tout reconstituer ! C’était un enjeu de décors, de casting, de costumes.” P. C. L’ESPRIT DU FLEUVE
Los silencios suit une mère et ses deux enfants fuyant le conflit armé
colombien, dans lequel leur mari et père a disparu, pour s’installer sur
une petite île à la frontière avec le Brésil et le Pérou. Partant d’une histoire
que lui avait racontée une amie, Beatriz Seigner est allée interroger plus de
80 familles colombiennes vivant au Brésil. “J’ai découvert que cette situation
était commune à beaucoup d’entre elles. Cette immigration est la seconde
au Brésil en termes d’importance.” Écriture, développement, financement
et production ont duré près de neuf ans. “Cela représente près du tiers de
© THE FILM-BAC FILMS-PLAYTIME PRODUCTION publics de soutien au cinéma au Brésil et en Colombie, auprès du CNC en
ma vie. Nous avons effectué 37 demandes de subventions auprès des fonds
France, d’Ibermédia et de l’Aide aux cinémas du monde. Nous avons essuyé
27 refus et reçu 10 aides”. Los silencios a été coproduit entre la France et la
Colombie pour un budget final de 1 M€. Le tournage s’est déroulé sur l’île
de la Fantasia, sur le fleuve Amazone. “Au départ, je pensais tourner dans un
quartier de Manaus. Mais il a été détruit à l’occasion de la Coupe du monde
de football. En découvrant cette île, je suis aussitôt tombée amoureuse du
lieu et de ses habitants. J’ai d’ailleurs réécrit le scénario, en augmentant son
aspect fantastique.” Le tournage sera une épreuve d’endurance. “Le niveau
du fleuve variait sans cesse et il pleuvait cinq fois par jour. Je dirigeais des
Semaine de la critique enfants dans une langue étrangère. Il a fallu parfois faire 13 prises pour que
cela fonctionne au niveau du jeu d’acteur. Mais comme disent les Indigènes,
DIAMANTINO la forêt amazonienne vous fait affronter toutes vos peurs.” P. C.
RICHE ET CÉLÈBRE Semaine de la critique
Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt ont réalisé ensemble deux courts métrages,
dont Palácios de pena, présenté en 2011 à la Mostra de Venise dans la section SHÉHÉRAZADE
Orizzonti. “Nous ne formons pas un duo de collaborateurs, ce qui équivaudrait à un
statut d’artiste unique. Nous ne formons pas non plus un collectif. Nous travaillons
ensemble car nous sommes amis. C’est à la fois agréable et gratifiant sur le plan
intellectuel. La pratique de l’art devient ainsi un processus social”, expliquent-ils. “Ils
ne divisent pas les tâches mais rebondissent sans cesse sur les idées de l’autre. Leurs
sensibilités sont différentes et, outre le plaisir de l’aventure collective, ils cherchent
à faire éclore un film par la collision de deux univers qui se nourrissent l’un l’autre”,
confirme Justin Taurand (Les Films du Bélier) qui suit le projet depuis ses débuts.
L’écriture et le développement de Diamantino sont le fruit d’un long cheminement.
“Nous sommes notamment passés par le Cinemart, l’Atelier du Festival de Cannes, © GEKO FILMS-ARTE FRANCE CINÉMA, AD VITAM
le Torino Film Lab, un parcours du combattant !”, souligne Justin Taurand. Celui-
ci a produit le film en coproduction avec la Portugaise Maria João Mayer (Mayer),
rejointe par le Brésilien Daniel Hoogstraten (Syndrome Films). Les trois partenaires
ont réuni un budget de 1,4 M€. “En France, il y a eu l’Aide franco-portugaise du CNC
ainsi que l’Aide aux cinémas du monde à la finition et des fonds propres. Je n’ai pas
cherché à faire lire le scénario aux distributeurs ou aux chaînes. Charades, le vendeur UNE JEUNESSE SUR LE FIL
international et UFO, le distributeur France, sont arrivés sur film fini.” P. C. Diplômé de l’École Louis-Lumière mais aussi de l’atelier scénario de La
femis, Jean-Bernard Marlin reçoit en 2013 l’Ours d’or du court métrage à
la Berlinale pour La fugue, ensuite nommé aux César. Une fiction tournée
caméra à l’épaule suivant un éducateur chargé d’emmener une adoles-
cente à son procès. Mais la jeune fille s’enfuit sur un coup de tête. Son
premier long métrage, Shéhérazade, s’inscrit dans une veine similaire.
Le cinéaste s’est notamment immergé dans le milieu de la prostitution
des jeunes à Marseille, avant d’écrire le scénario avec Catherine Paillé.
© LES FILMS DU BÉLIER-SYNDROME FILMS vivant même en marge de la société, le travail avec eux étant au cœur du
Le film est à nouveau porté par de jeunes comédiens non-professionnels,
projet. Tourné durant l’été dernier, Shéhérazade a été produit par Grégoire
Debailly pour Geko Films. Soutenu par la Fondation Gan, il est coproduit
par Arte France Cinéma. Préacheté par Canal+, il a bénéficié de l’Avance
P. C.
sur recettes du CNC.
11 mai 2018