Page 13 - LFF04
P. 13
UALITÉS 13
[Distribution-Exploitation] donne la parole à… © PASCAL CHANTIER
LES RENCONTRES Emmanuel Mouret
DU CINÉMA
INDÉPENDANT Réalisateur Chronique d’une liaison passagère, Cannes Première
“ENFIN À CAEN !”
Emmanuel Mouret a imposé, au fil des temps,
Après deux ans de suspension pour cause de crise un ton et un univers particuliers, souvent
sanitaire, le rendez-vous organisé par le Syndicat proche du marivaudage, mais proposant
des distributeurs indépendants fait son grand de temps en temps des ruptures.
retour, du 21 au 23 juin prochain, pour une 7e édition Son onzième long métrage, Chronique
en Normandie. Avec la volonté de renforcer d’une liaison passagère, né dans
des circonstances particulières,
Ison caractère événementiel. ■ SYLVAIN DEVARIEUX est présenté cette année dans le cadre
l a fallu s’armer de patience. Après deux années de report à de Cannes Première.
l’aune de la pandémie, le SDI peut enfin tenir la 7e édition de ses
Rencontres du cinéma indépendant dans le chef-lieu du Calvados. z Comment vous viennent les idées de films ?
“Enfin, à Caen !”, se réjouit ainsi Étienne Ollagnier, coprésident du Certains films sont une accumulation d’idées qui trouvent un juste assemblage
syndicat, qui a levé le voile sur le programme de la manifestation à entre elles. Pour Mademoiselle de Joncquières mon producteur m’a suggéré de faire
l’occasion d’un cocktail à Cannes, ce vendredi 20 mai. “Le projet un film en costumes et j’avais le souvenir de ce récit de Diderot. Pour Chronique
des Rencontres s’inscrit toujours dans la durée. Nous reprenons donc d’une liaison passagère c’est plus particulier. Je suis intervenu dans un atelier
le rythme interrompu par la pandémie ces dernières années, mais à un d’écriture et l’un des participants, le comédien Pierre Giraud, a écrit à son issue
moment important. Car il devient crucial d’agencer des temps d’échange deux scènes qui m’ont particulièrement plu. Je l’ai encouragé à les développer
et des passerelles entre les distributeurs indépendants, les salles et les au lieu d’en faire un court métrage. Nous avons eu plusieurs échanges et comme
partenaires et autres acteurs du marché, afin de répondre aux probléma- j’aimais beaucoup les personnages qui en émergeaient, je lui ai proposé d’adapter
tiques actuelles”, nous confie le distributeur. Au cœur de ces trois jours cette ébauche de scénario à ma façon.
de rencontres, une dizaine de projections de films (cf. encadré ci-dessous)
issus des line-ups des distributeurs du SDI, dont un titre jeune public et z Vous travaillez depuis vos débuts avec le même producteur Frédéric
une réédition de patrimoine. Niedermayer. Qu’attendez-vous d’un producteur ?
UN ATELIER DE BONNES IDÉES Énormément de choses. Le réalisateur et le producteur sont les deux seules
personnes qui suivent le film depuis son écriture, jusque son montage et sa sortie.
Comme d’habitude, la sélection a été décidée par le vote des membres du Nous vivons avec lui très longtemps. C’est l’enthousiasme du producteur à la lecture
syndicat (sans possibilité de voter pour son propre film). Avec une petite d’un scénario qui me laisse croire que le film est possible. C’est donc une relation
nouveauté : l’ajout d’un film coup de cœur, désigné, lui, par le Groupe- artistique, puisqu’il intervient dans le processus créatif.
ment associatif de programmation des exploitants caennais (GAP). “Ce
qui permet de consolider notre ancrage local, dans le territoire qui nous z Ressentez-vous des difficultés de financement pour le type de cinéma
accueille cette année.” Au programme également, ponctué de plusieurs que vous incarnez ?
moments festifs, une présentation des line-ups d’une quinzaine de dis-
tributeurs membres, une conférence baptisée “Distributeur indépendant : Nous en avons rencontré pour la plus grande partie des films que nous avons faits
l’amour du risque”, et un atelier collaboratif baptisé Le Café des indés. ensemble. Mais je crois que c’est un peu le propre de beaucoup de longs métrages.
“Notre ambition est de renforcer le caractère événementiel du rendez- Je me souviens que, quand j’étais adolescent, on parlait déjà de la mort du cinéma.
vous, de l’installer définitivement sur le calendrier professionnel, tout Cela revient sans cesse. Mais Frédéric Niedermayer arrive toujours
en le rendant plus concret et opérationnel, poursuit Étienne Ollagnier. à s’adapter et à trouver des solutions en jouant avec les contraintes.
C’est dans cette optique que, parmi les principaux échanges le ponctuant, Oui le paysage cinématographique change avec l’avènement des plateformes
développés avec Anne Pouliquen qui nous aide cette année à agencer les et la grosse désaffection que subissent les salles. Mais c’est peut-être parce que
Rencontres, nous avons décidé d’instaurer cet atelier de bonnes idées. le contexte est inquiétant qu’il faut d’autant plus s’attacher à faire des films.
Avec l’objectif d’aboutir à des actions concrètes, pour des travaux que
nous allons suivre et prolonger, en commun, tout au long de l’année.” ❖ z Mais cette désaffection des salles ne vous fait pas peur ?
J’ai parlé récemment avec une amie scénariste qui travaille sur des séries.
LA SÉLECTION Elle a commencé à écrire dans l’euphorie, mais à présent elle trouve que l’écriture
est tellement mécanique, à cause des contraintes liées aux demandes des chaînes,
10 FILMS + 1 COUP DE CŒUR qu’elle retrouve un goût particulier à revoir des films au cinéma, car ils échappent
•140 km à l’ouest du Paradis de Céline Rouzet (distribué à ce moule. Je me dis que tout fonctionne un peu par vagues et que cette hégémonie
de la série pourra lasser à un moment certains spectateurs qui reviendront
par New Story) alors vers le cinéma.
•À pas aveugles de Christophe Cognet (Survivance) z Avec l’arrivée des plateformes, le combat pour le droit d’auteur est-il plus
•Comedy Queen de Sanna Lenken (Les Films du Préau) que jamais d’actualité selon vous ?
•F for Fake (Vérités et mensonges) d’Orson Welles, réédition
Bien sûr et au-delà de mon cas personnel, car les plateformes incarnent une certaine
(Potemkine) opacité, tandis que les chaînes de télévision participent de façon vertueuse au finan-
cement du cinéma. Et c’est un peu inique à mes yeux. Tous les auteurs au sens large,
•Reprise en main de Gilles Perret (Jour2Fête) scénaristes, mais aussi compositeurs, se retrouvent face à une sorte de Big Brother
•La romancière d’Hong Sangsoo (Arizona Distribution) qui ne communique pas sur le nombre de vues. C’est un retour en arrière en quelque
•Shabu de Shamira Raphaela (Urban Distribution) sorte. Les films sont considérés comme des produits. Heureusement, des avancées
•Stop-Zemlia de Kateryna Gornostai (Wayna Pitch) - ont été faites par la Sacd face à ce bouleversement assez récent mais brutal.
coup de cœur du GAP Recueilli par Patrice Carré
•Straight Up de James Sweeney (L’Atelier Distribution) LA SACD À CANNES
•Vesper de Kristina Buozyte et Bruno Samper (Condor Distribution)
•Yuku et la fleur de l’Himalaya d’Arnaud Demuynck Palais des Festivals, Niveau -1, stand 19-04, 06 79 02 66 54
Commission cinéma de la SACD :
et Rémi Durin (Gebeka Films)
Delphine Gleize, Jean-Paul Salomé (Président), Pie2rr1e2m1Samic2ah0i 2o20e22ller
Tout le programme sur www.sacd.fr
[Distribution-Exploitation] donne la parole à… © PASCAL CHANTIER
LES RENCONTRES Emmanuel Mouret
DU CINÉMA
INDÉPENDANT Réalisateur Chronique d’une liaison passagère, Cannes Première
“ENFIN À CAEN !”
Emmanuel Mouret a imposé, au fil des temps,
Après deux ans de suspension pour cause de crise un ton et un univers particuliers, souvent
sanitaire, le rendez-vous organisé par le Syndicat proche du marivaudage, mais proposant
des distributeurs indépendants fait son grand de temps en temps des ruptures.
retour, du 21 au 23 juin prochain, pour une 7e édition Son onzième long métrage, Chronique
en Normandie. Avec la volonté de renforcer d’une liaison passagère, né dans
des circonstances particulières,
Ison caractère événementiel. ■ SYLVAIN DEVARIEUX est présenté cette année dans le cadre
l a fallu s’armer de patience. Après deux années de report à de Cannes Première.
l’aune de la pandémie, le SDI peut enfin tenir la 7e édition de ses
Rencontres du cinéma indépendant dans le chef-lieu du Calvados. z Comment vous viennent les idées de films ?
“Enfin, à Caen !”, se réjouit ainsi Étienne Ollagnier, coprésident du Certains films sont une accumulation d’idées qui trouvent un juste assemblage
syndicat, qui a levé le voile sur le programme de la manifestation à entre elles. Pour Mademoiselle de Joncquières mon producteur m’a suggéré de faire
l’occasion d’un cocktail à Cannes, ce vendredi 20 mai. “Le projet un film en costumes et j’avais le souvenir de ce récit de Diderot. Pour Chronique
des Rencontres s’inscrit toujours dans la durée. Nous reprenons donc d’une liaison passagère c’est plus particulier. Je suis intervenu dans un atelier
le rythme interrompu par la pandémie ces dernières années, mais à un d’écriture et l’un des participants, le comédien Pierre Giraud, a écrit à son issue
moment important. Car il devient crucial d’agencer des temps d’échange deux scènes qui m’ont particulièrement plu. Je l’ai encouragé à les développer
et des passerelles entre les distributeurs indépendants, les salles et les au lieu d’en faire un court métrage. Nous avons eu plusieurs échanges et comme
partenaires et autres acteurs du marché, afin de répondre aux probléma- j’aimais beaucoup les personnages qui en émergeaient, je lui ai proposé d’adapter
tiques actuelles”, nous confie le distributeur. Au cœur de ces trois jours cette ébauche de scénario à ma façon.
de rencontres, une dizaine de projections de films (cf. encadré ci-dessous)
issus des line-ups des distributeurs du SDI, dont un titre jeune public et z Vous travaillez depuis vos débuts avec le même producteur Frédéric
une réédition de patrimoine. Niedermayer. Qu’attendez-vous d’un producteur ?
UN ATELIER DE BONNES IDÉES Énormément de choses. Le réalisateur et le producteur sont les deux seules
personnes qui suivent le film depuis son écriture, jusque son montage et sa sortie.
Comme d’habitude, la sélection a été décidée par le vote des membres du Nous vivons avec lui très longtemps. C’est l’enthousiasme du producteur à la lecture
syndicat (sans possibilité de voter pour son propre film). Avec une petite d’un scénario qui me laisse croire que le film est possible. C’est donc une relation
nouveauté : l’ajout d’un film coup de cœur, désigné, lui, par le Groupe- artistique, puisqu’il intervient dans le processus créatif.
ment associatif de programmation des exploitants caennais (GAP). “Ce
qui permet de consolider notre ancrage local, dans le territoire qui nous z Ressentez-vous des difficultés de financement pour le type de cinéma
accueille cette année.” Au programme également, ponctué de plusieurs que vous incarnez ?
moments festifs, une présentation des line-ups d’une quinzaine de dis-
tributeurs membres, une conférence baptisée “Distributeur indépendant : Nous en avons rencontré pour la plus grande partie des films que nous avons faits
l’amour du risque”, et un atelier collaboratif baptisé Le Café des indés. ensemble. Mais je crois que c’est un peu le propre de beaucoup de longs métrages.
“Notre ambition est de renforcer le caractère événementiel du rendez- Je me souviens que, quand j’étais adolescent, on parlait déjà de la mort du cinéma.
vous, de l’installer définitivement sur le calendrier professionnel, tout Cela revient sans cesse. Mais Frédéric Niedermayer arrive toujours
en le rendant plus concret et opérationnel, poursuit Étienne Ollagnier. à s’adapter et à trouver des solutions en jouant avec les contraintes.
C’est dans cette optique que, parmi les principaux échanges le ponctuant, Oui le paysage cinématographique change avec l’avènement des plateformes
développés avec Anne Pouliquen qui nous aide cette année à agencer les et la grosse désaffection que subissent les salles. Mais c’est peut-être parce que
Rencontres, nous avons décidé d’instaurer cet atelier de bonnes idées. le contexte est inquiétant qu’il faut d’autant plus s’attacher à faire des films.
Avec l’objectif d’aboutir à des actions concrètes, pour des travaux que
nous allons suivre et prolonger, en commun, tout au long de l’année.” ❖ z Mais cette désaffection des salles ne vous fait pas peur ?
J’ai parlé récemment avec une amie scénariste qui travaille sur des séries.
LA SÉLECTION Elle a commencé à écrire dans l’euphorie, mais à présent elle trouve que l’écriture
est tellement mécanique, à cause des contraintes liées aux demandes des chaînes,
10 FILMS + 1 COUP DE CŒUR qu’elle retrouve un goût particulier à revoir des films au cinéma, car ils échappent
•140 km à l’ouest du Paradis de Céline Rouzet (distribué à ce moule. Je me dis que tout fonctionne un peu par vagues et que cette hégémonie
de la série pourra lasser à un moment certains spectateurs qui reviendront
par New Story) alors vers le cinéma.
•À pas aveugles de Christophe Cognet (Survivance) z Avec l’arrivée des plateformes, le combat pour le droit d’auteur est-il plus
•Comedy Queen de Sanna Lenken (Les Films du Préau) que jamais d’actualité selon vous ?
•F for Fake (Vérités et mensonges) d’Orson Welles, réédition
Bien sûr et au-delà de mon cas personnel, car les plateformes incarnent une certaine
(Potemkine) opacité, tandis que les chaînes de télévision participent de façon vertueuse au finan-
cement du cinéma. Et c’est un peu inique à mes yeux. Tous les auteurs au sens large,
•Reprise en main de Gilles Perret (Jour2Fête) scénaristes, mais aussi compositeurs, se retrouvent face à une sorte de Big Brother
•La romancière d’Hong Sangsoo (Arizona Distribution) qui ne communique pas sur le nombre de vues. C’est un retour en arrière en quelque
•Shabu de Shamira Raphaela (Urban Distribution) sorte. Les films sont considérés comme des produits. Heureusement, des avancées
•Stop-Zemlia de Kateryna Gornostai (Wayna Pitch) - ont été faites par la Sacd face à ce bouleversement assez récent mais brutal.
coup de cœur du GAP Recueilli par Patrice Carré
•Straight Up de James Sweeney (L’Atelier Distribution) LA SACD À CANNES
•Vesper de Kristina Buozyte et Bruno Samper (Condor Distribution)
•Yuku et la fleur de l’Himalaya d’Arnaud Demuynck Palais des Festivals, Niveau -1, stand 19-04, 06 79 02 66 54
Commission cinéma de la SACD :
et Rémi Durin (Gebeka Films)
Delphine Gleize, Jean-Paul Salomé (Président), Pie2rr1e2m1Samic2ah0i 2o20e22ller
Tout le programme sur www.sacd.fr