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18 LES FILMS DU JOUR
Quinzaine des réalisateurs Quinzaine des réalisateurs
EL MOTOARREBATADOR CARMEN Y LOLA
PREMIÈRES AMOURS CLANDESTINES
Arantxa Echevarría travaille dans le cinéma en tant que scénariste,
réalisatrice, mais aussi productrice. Son court Panchito a récolté près d’une
vingtaine de prix dans le monde entier. Pour son premier long métrage, elle
a choisi de se pencher sur l’histoire d’un premier amour. “Ce n’est jamais
facile car cela arrive généralement à l’adolescence, alors que vous n’avez
pas encore votre place dans ce monde et que vous cherchez à vous définir
en tant qu’individu. Et c’est une histoire d’autant plus difficile qu’elle a
lieu entre deux jeunes gitanes.” Le processus d’écriture a été assez court,
le scénario étant prêt en trois mois. Mais un long chemin restait encore à
faire. “J’avais besoin de m’imprégner de la culture tzigane pour raconter
cette histoire avec vérité et respect. Je devais rencontrer ces filles qui avaient
besoin d’une voix car elles n’en avaient pas. Mais les trouver était compliqué
à cause des tabous liés à leur culture.” Même problème pour trouver les
interprètes des deux héroïnes. “Dans le monde rom, les gens ont peur de ce
que la communauté peut penser de vous, or je cherchais des adolescents
© RIZOMA FILMS qui auraient le courage d’incarner des personnages homosexuels. J’ai pensé
par moments que je ne pourrais pas tourner car je ne trouvais personne. Et à
la fin, alors que j’étais au bord du désespoir, je les ai trouvées. Deux jeunes
filles avec un passé chargé, mal mariées, particulièrement déconsidérées
REPENTANCE dans la communauté rom et qui n’avaient rien à perdre”. Le film a été tourné
Deuxième film d’Agustín Toscano, qui avait auparavant coréalisé Los dueños en mai 2017 à Madrid, où les communautés gitanes vivent de façon plus
avec Ezequiel Radusky (Semaine de la critique 2013), El motoarrebatador a mis repliée que celles du Sud du pays, mieux intégrées dans la société. P. C.
quatre ans à se faire, essuyant au départ beaucoup de refus des fonds d’aides. Un
cheminement en fin de compte bénéfique, qui a permis au cinéaste de consolider
son projet en cours de route. “Mon idée première était de raconter une histoire
policière mais sans policiers, souligne ce dernier. L’idée m’en est venue en souvenir
d’un choc que j’ai subi il y a dix ans, lorsque ma mère a été victime d’un vol à
l’arraché. J’ai commencé à fantasmer sur la vie de ce voleur, ce qui m’a amené à
imaginer le reste du film. J’ai alors écrit l’histoire de quelqu’un de tourmenté par
la culpabilité en raison de ses actions passées, persécuté par son ombre et sa
conscience.” Le film se présente aussi comme une radiographie de la périphérie
de Tucumán, la plus petite ville d’Argentine, mais aussi la plus surpeuplée, et
dont est originaire Agustín Toscano. C’est d’ailleurs là qu’il a choisi de planter sa
caméra, tout en choisissant de rompre avec le naturalisme de son travail précé-
dent. “Nous avons tourné dans des quartiers périphériques, très marginaux, avec
d’énormes décharges d’ordures mais aussi des collines imposantes, plantées de
citronniers, représentant un véritable contrepoint dramatique. Je voulais montrer
l’environnement de mon personnage comme s’il s’agissait d’un véritable paysage
intérieur désertique.” Peu habitués aux tournages, population et autorités locales © TVTEC SERVICIOS AUDIOVISUALES SL
ont apporté un précieux soutien. “Nous avons pu filmer des poursuites avec de
vrais flics, tourner à l’intérieur de la prison, utiliser un supermarché comme décor.
C’était merveilleux de recevoir tant d’appui.” P. C.
Quinzaine des réalisateurs
AMIN
QUAND AMIN RENCONTRE GABRIELLE
Trois ans après Fatima, Philippe Faucon revient à la Quinzaine des réalisateurs
pour y présenter Amin, dont le sujet original lui a été apporté par Yasmina Nini-
Faucon, d’après un personnage réel proche d’elle. Tous deux ont ensuite développé
le scénario avec Mustapha Kharmoudi. “Le film a trouvé son financement sans
vraies difficultés, sans doute en raison du succès de Fatima, qui, lui, avait été plus
compliqué à produire, souligne Philippe Faucon. Aux partenaires déjà présents sur
mon précédent long (CNC, Arte, Rhône-Alpes Cinéma devenu Auvergne-Rhône-
Alpes Cinéma, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur), se sont ajoutés Canal+,
la région Île-de-France et NJJ.” Pour le casting, le cinéaste a choisi d’associer
Emmanuelle Devos à un inconnu, Moustapha Mbengue. “J’avais vu Emmanuelle
dans le film de Jérôme Bonnell, Le temps de l’aventure. Il y a une séquence de jeu
très forte où elle fait deux prises, l’une après l’autre, lors d’un essai de casting (elle
joue une comédienne). C’est une séquence sans montage où elle porte successive-
ment et superbement deux fois la scène. Pour Amin, peut-être que j’ai été intéressé
par le fait qu’elle se trouverait en terrain inconnu, à l’opposé de ce qu’elle avait
fait jusque-là. Concernant Moustapha, je l’ai rencontré par l’intermédiaire de Leïla
Fournier, une directrice de casting avec qui j’avais travaillé précédemment avec une
grande connivence sur le casting de Fiertés, la minisérie que j’ai tournée pour Arte
juste avant Amin. Nous étions en recherche depuis plus de dix mois, sans résultat.
Moustapha avait, lorsque je l’ai rencontré, une maîtrise partielle du français, mais
je trouvais qu’il avait une belle présence. Nous avons dû travailler énormément avec © ISTIQLAL FILMS
lui, mais il est très accrocheur et, au final, il est le personnage du film.” P. C.
15 mai 2018