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16 RENCONTRE
Ayant signé les images HÉLLÈONUE VART
du deuxième long métrage Cheffe opératrice
de Léonor Seraille, Un petit
frère, présenté en compétition
officielle, elle a toujours
alterné les films d’auteurs
et ceux de cinéastes
confirmés, effectuant une
grand partie de sa carrière
à l’international. ■ PATRICE CARRÉ
◗ On remarque dans votre SUR LES Car un éclairage est très lié au pays dans © DR
filmographie des collaborations PREMIERS FILMS, lequel on tourne. Les gens voient les
sur beaucoup de premiers films ON DONNE PARFOIS choses différemment, les saisons et les ◗ Qu’est-ce qui vous a convaincue
mais pas uniquement. Comment PLUS CAR CELA contrastes sont différents. Il faut savoir de la rejoindre sur le film ?
résumer la tendance générale REPRÉSENTE UNE s’adapter visuellement à la façon du pays. J’ai lu le scénario, que j’ai trouvé très
de votre parcours ? NOUVEAUTÉ. MAIS Entre un film en Norvège et un autre à Rio profond. Et en parlant avec Léonor, j’ai
J’ai toujours un peu alterné entre le fait ON REÇOIT AUSSI de Janeiro, tout change : les maisons, les compris qu’elle a en elle une sincérité qui
de travailler sur des premiers films pour DIFFÉREMMENT. intérieurs, les baies vitrées, la lumière et me plaît beaucoup. Elle n’essayait pas de
enchaîner ensuite sur ceux de réalisateurs la nature. Et je dirais même que les gens vendre sa position de réalisatrice, seule-
plus confirmés. Avec ces derniers, on a des cette inventivité, mais cela reste toujours ne se déplacent pas de la même façon. ment de lancer une collaboration pour pou-
échanges quasiment d’égal à égal. Sur les lié à l’histoire. En ce moment, je suis en Donc cela influe aussi sur le découpage. voir aller loin dans le projet. Elle le portait
premiers films, on donne parfois plus car Angleterre pour un film d’époque avec en elle et cherchait quelqu’un pour l’aider
cela représente une nouveauté, donc cela Karim Aïnouz, qui est assez conséquent ◗ Voyez-vous arriver de plus en plus à le faire aboutir. Même si elle avait encore
amène de la curiosité. Mais on reçoit aussi en termes de production. J’avais travaillé de femmes dans votre métier ? des questionnements, elle était prête à le
différemment. auparavant à Londres sur un autre film Oui, bien sûr. Je travaille depuis des partager avec moi.
qui s’appelle Rocks (de Sarah Gavron, années avec Marianne Lamour, une
◗ Vous avez aussi fait beaucoup Ndlr), qui était beaucoup plus léger, très cheffe électricienne. J’ai assez souvent ◗ Quelles étaient ses demandes
de documentaires. Cela influe-t-il sur contemporain. Et pendant le tournage du une assistante opératrice qui s’appelle sur le film ?
votre façon de travailler la fiction ? film de Karim, quelqu’un de l’équipe m’a Hélène (Degrandcourt, Ndlr) également. Plutôt que de travailler sur l’image ou le
Oui, absolument. Quand je le peux, je dit : “Je ne te reconnais pas, c’est vraiment En ce moment, en Angleterre, je travaille découpage, notre collaboration est passée
continue d’ailleurs à travailler sur des différent à chaque fois ce que tu fais.” Sans avec une cheffe électricienne et j’y ai ren- essentiellement par le biais du scénario.
documentaires. J’aime beaucoup car cela doute que j’ai un style, mais j’essaie tou- contré il y a quelque temps ma première Elle me l’a beaucoup expliqué, nous avons
apprend à être malléable, à filmer d’une jours de faire une lumière et des cadres cheffe machiniste. J’aime beaucoup énormément parlé autour des scènes.
manière fluide. Et cela oblige aussi à une appropriés, en fonction des besoins du mélanger les équipes, femmes et hommes Puis l’image est arrivée d’elle-même.
certaine autonomie. Lorsqu’une équipe réalisateur ou de la réalisatrice. Sinon, ensemble. Néanmoins, si je sens sur le Nous avons compris qu’il fallait qu’elle
est beaucoup plus conséquente autour cela deviendrait ennuyeux. plateau qu’on parle mal à une personne soit lumineuse, ce qui ne veut pas dire
de moi, cette pratique du documentaire sous prétexte que c’est une femme, je claire et surexposée. L’image devait être
me permet de garder une vraie souplesse ◗ Y a-t-il des moments clés, peux réagir très vite. Je suis très vigilante le contre-pied de moments un peu drama-
dans ma manière de travailler. Par ailleurs, des étapes dans votre carrière ? à cela. Pour ma part, j’ai été cheffe opéra- tiques, que cela soit même un peu onirique
j’ai, à une époque, travaillé sur beaucoup Je pense qu’il y a eu surtout le fait de trice dès que je suis sortie de l’école. J’ai par moments. Léonor a une personnalité
de documentaires de danse. Prendre en travailler sur de plus en plus de projets toujours suivi ce que j’avais envie de faire très intuitive et n’a pas peur. Moi non plus.
compte la synergie des déplacements a à l’international. Rencontrer des équipes et je n’ai pas rencontré d’obstacles du fait C’était très plaisant. ❖
influencé ma manière de cadrer. D’autant étrangères, être en présence d’autres d’être une femme.
que tout déplacement sur un plateau cultures a représenté un énorme chan-
s’apparente à une sorte de chorégraphie. gement, car j’ai dû m’adapter à d’autres ◗ Vous avez signé l’image du
Cela m’a appris à pouvoir anticiper les façons de travailler, même si, en fin de deuxième long métrage de Léonor
déplacements ou, au contraire, prendre un compte, la base ne change pas beaucoup. Seraille, Un petit frère. Comment
peu de retard afin que ce soit le personnage s’est faite votre rencontre ?
qui guide le cadre. Cela m’a extrêmement Notre rencontre s’est faite par Skype,
marqué et je le garde toujours en moi. après la lecture de son scénario. Ma
première question a été de savoir pour-
◗ Qu’est ce qui détermine l’envie quoi elle ne travaillait pas avec Émilie
de travailler sur un film ? Noblet, la cheffe opératrice de son film
Je collabore souvent avec les mêmes précédent, car j’avais trouvé l’image de
personnes. Quand il s’agit de nouvelles Jeune femme très belle. Je ne voulais
collaborations, le plus important c’est le absolument pas prendre la place de qui-
scénario et, bien sûr, la personnalité du conque, surtout pas pour des raisons
cinéaste. Que ce soit un premier ou un de production. Sous prétexte que le film
énième film, est-ce quelqu’un souhaitant est mieux financé, alors on se permet de
faire quelque chose d’un peu inventif, est- changer d’équipe car les challenges sont
ce qu’il y aura de la recherche ? Si cela plus importants. Elle m’a tout de suite dit
fait défaut, j’aurai sans doute tendance à que son opératrice n’était tout simple-
m’engager moins facilement sur le projet. ment pas disponible et qu’elles avaient
Mais bizarrement, celles et ceux qui me ensemble pensé à moi. Cela a donc été
contactent me présentent toujours des très clair dès le début.
projets inventifs. Peut-être parce qu’on
sait comment je travaille.
◗ Vous avez donc un style, une façon
d’éclairer qui vous est propre…
Si j’ai un style, il se situe justement dans
24 mai 2022
Ayant signé les images HÉLLÈONUE VART
du deuxième long métrage Cheffe opératrice
de Léonor Seraille, Un petit
frère, présenté en compétition
officielle, elle a toujours
alterné les films d’auteurs
et ceux de cinéastes
confirmés, effectuant une
grand partie de sa carrière
à l’international. ■ PATRICE CARRÉ
◗ On remarque dans votre SUR LES Car un éclairage est très lié au pays dans © DR
filmographie des collaborations PREMIERS FILMS, lequel on tourne. Les gens voient les
sur beaucoup de premiers films ON DONNE PARFOIS choses différemment, les saisons et les ◗ Qu’est-ce qui vous a convaincue
mais pas uniquement. Comment PLUS CAR CELA contrastes sont différents. Il faut savoir de la rejoindre sur le film ?
résumer la tendance générale REPRÉSENTE UNE s’adapter visuellement à la façon du pays. J’ai lu le scénario, que j’ai trouvé très
de votre parcours ? NOUVEAUTÉ. MAIS Entre un film en Norvège et un autre à Rio profond. Et en parlant avec Léonor, j’ai
J’ai toujours un peu alterné entre le fait ON REÇOIT AUSSI de Janeiro, tout change : les maisons, les compris qu’elle a en elle une sincérité qui
de travailler sur des premiers films pour DIFFÉREMMENT. intérieurs, les baies vitrées, la lumière et me plaît beaucoup. Elle n’essayait pas de
enchaîner ensuite sur ceux de réalisateurs la nature. Et je dirais même que les gens vendre sa position de réalisatrice, seule-
plus confirmés. Avec ces derniers, on a des cette inventivité, mais cela reste toujours ne se déplacent pas de la même façon. ment de lancer une collaboration pour pou-
échanges quasiment d’égal à égal. Sur les lié à l’histoire. En ce moment, je suis en Donc cela influe aussi sur le découpage. voir aller loin dans le projet. Elle le portait
premiers films, on donne parfois plus car Angleterre pour un film d’époque avec en elle et cherchait quelqu’un pour l’aider
cela représente une nouveauté, donc cela Karim Aïnouz, qui est assez conséquent ◗ Voyez-vous arriver de plus en plus à le faire aboutir. Même si elle avait encore
amène de la curiosité. Mais on reçoit aussi en termes de production. J’avais travaillé de femmes dans votre métier ? des questionnements, elle était prête à le
différemment. auparavant à Londres sur un autre film Oui, bien sûr. Je travaille depuis des partager avec moi.
qui s’appelle Rocks (de Sarah Gavron, années avec Marianne Lamour, une
◗ Vous avez aussi fait beaucoup Ndlr), qui était beaucoup plus léger, très cheffe électricienne. J’ai assez souvent ◗ Quelles étaient ses demandes
de documentaires. Cela influe-t-il sur contemporain. Et pendant le tournage du une assistante opératrice qui s’appelle sur le film ?
votre façon de travailler la fiction ? film de Karim, quelqu’un de l’équipe m’a Hélène (Degrandcourt, Ndlr) également. Plutôt que de travailler sur l’image ou le
Oui, absolument. Quand je le peux, je dit : “Je ne te reconnais pas, c’est vraiment En ce moment, en Angleterre, je travaille découpage, notre collaboration est passée
continue d’ailleurs à travailler sur des différent à chaque fois ce que tu fais.” Sans avec une cheffe électricienne et j’y ai ren- essentiellement par le biais du scénario.
documentaires. J’aime beaucoup car cela doute que j’ai un style, mais j’essaie tou- contré il y a quelque temps ma première Elle me l’a beaucoup expliqué, nous avons
apprend à être malléable, à filmer d’une jours de faire une lumière et des cadres cheffe machiniste. J’aime beaucoup énormément parlé autour des scènes.
manière fluide. Et cela oblige aussi à une appropriés, en fonction des besoins du mélanger les équipes, femmes et hommes Puis l’image est arrivée d’elle-même.
certaine autonomie. Lorsqu’une équipe réalisateur ou de la réalisatrice. Sinon, ensemble. Néanmoins, si je sens sur le Nous avons compris qu’il fallait qu’elle
est beaucoup plus conséquente autour cela deviendrait ennuyeux. plateau qu’on parle mal à une personne soit lumineuse, ce qui ne veut pas dire
de moi, cette pratique du documentaire sous prétexte que c’est une femme, je claire et surexposée. L’image devait être
me permet de garder une vraie souplesse ◗ Y a-t-il des moments clés, peux réagir très vite. Je suis très vigilante le contre-pied de moments un peu drama-
dans ma manière de travailler. Par ailleurs, des étapes dans votre carrière ? à cela. Pour ma part, j’ai été cheffe opéra- tiques, que cela soit même un peu onirique
j’ai, à une époque, travaillé sur beaucoup Je pense qu’il y a eu surtout le fait de trice dès que je suis sortie de l’école. J’ai par moments. Léonor a une personnalité
de documentaires de danse. Prendre en travailler sur de plus en plus de projets toujours suivi ce que j’avais envie de faire très intuitive et n’a pas peur. Moi non plus.
compte la synergie des déplacements a à l’international. Rencontrer des équipes et je n’ai pas rencontré d’obstacles du fait C’était très plaisant. ❖
influencé ma manière de cadrer. D’autant étrangères, être en présence d’autres d’être une femme.
que tout déplacement sur un plateau cultures a représenté un énorme chan-
s’apparente à une sorte de chorégraphie. gement, car j’ai dû m’adapter à d’autres ◗ Vous avez signé l’image du
Cela m’a appris à pouvoir anticiper les façons de travailler, même si, en fin de deuxième long métrage de Léonor
déplacements ou, au contraire, prendre un compte, la base ne change pas beaucoup. Seraille, Un petit frère. Comment
peu de retard afin que ce soit le personnage s’est faite votre rencontre ?
qui guide le cadre. Cela m’a extrêmement Notre rencontre s’est faite par Skype,
marqué et je le garde toujours en moi. après la lecture de son scénario. Ma
première question a été de savoir pour-
◗ Qu’est ce qui détermine l’envie quoi elle ne travaillait pas avec Émilie
de travailler sur un film ? Noblet, la cheffe opératrice de son film
Je collabore souvent avec les mêmes précédent, car j’avais trouvé l’image de
personnes. Quand il s’agit de nouvelles Jeune femme très belle. Je ne voulais
collaborations, le plus important c’est le absolument pas prendre la place de qui-
scénario et, bien sûr, la personnalité du conque, surtout pas pour des raisons
cinéaste. Que ce soit un premier ou un de production. Sous prétexte que le film
énième film, est-ce quelqu’un souhaitant est mieux financé, alors on se permet de
faire quelque chose d’un peu inventif, est- changer d’équipe car les challenges sont
ce qu’il y aura de la recherche ? Si cela plus importants. Elle m’a tout de suite dit
fait défaut, j’aurai sans doute tendance à que son opératrice n’était tout simple-
m’engager moins facilement sur le projet. ment pas disponible et qu’elles avaient
Mais bizarrement, celles et ceux qui me ensemble pensé à moi. Cela a donc été
contactent me présentent toujours des très clair dès le début.
projets inventifs. Peut-être parce qu’on
sait comment je travaille.
◗ Vous avez donc un style, une façon
d’éclairer qui vous est propre…
Si j’ai un style, il se situe justement dans
24 mai 2022